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[Deauville 2016]”Le Teckel” l’humanité féroce et tendre par Todd Solondz

[Deauville 2016]”Le Teckel” l’humanité féroce et tendre par Todd Solondz

02 September 2016 | PAR Olivia Leboyer

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En suivant l’itinéraire d’un teckel, Todd Solondz (Bienvenue dans l’âge ingrat, Palindromes) nous livre quatre saynètes plutôt dérangeantes. L’animal, chaque fois, devient le révélateur de troubles, malaises, angoisses particulièrement aigus. Quelques scènes, très marquantes, resteront.

[rating=3]

Le teckel apparaît ici comme un prétexte, un peu ridicule. Ce « chien saucisse » (l’anglais Wiener-Dog est plus évocateur), à la mode dans les années 1980, ne court plus les rues aujourd’hui, remplacé par d’autres chiens (Jack Russel ou bouledogues). Le choix du teckel, en lui-même, donne au film une petite patine nostalgique, un peu triste.

Ce chien transpire l’abandon, le manque d’amour. D’ailleurs, il se répand en diarrhées, un peu partout. En quatre saynètes très corrosives, Todd Solondz épingle les mesquineries, les lâchetés et les misères humaines. Le cancer, la peur du chômage, la drogue, la haine de soi, l’échec, la mort qui approche, le sentiment d’être passé à côté de sa vie : vous en voulez encore ? Todd Solondz ne vous épargnera rien. Portées par des acteurs exceptionnels, les séquences brillent toutes d’une noirceur étouffante. Le dosage entre férocité et sentimentalisme n’est pas toujours parfaitement équilibré, et cela déborde parfois trop d’un côté ou de l’autre.

Julie Delpy en mère courage-indigne, Greta Gerwig et Kieran Culkin en marginaux dans l’impasse, nous touchent. Mais les plus belles séquences sont incarnées par un Danny de Vito extrêmement émouvant en prof de cinéma solitaire, tourné en dérision par ses étudiants impitoyables, et par une Ellen Burstyn impériale et ravagée en vieille dame au bout du chemin, qui ne sait plus comment ni à qui dire au revoir ou donner des conseils.

L’histoire du teckel est cohérente au début, le chien assurant le lien entre les premières saynètes. Mais, ensuite, c’est un autre chien, n’importe quel chien, une sorte de chien universel, que nous suivons à la trace, avec sa triste ballade.

Ce film-saucisson est âpre, presque désespéré. Par instants, un éclair d’humanité et de tendresse surgit, pour nous atteindre.

Le Teckel, de Todd Solondz, USA, 1h28, avec Ellen Burstyn, Kieran Culkin, Julie Delpy, Danny de Vito, Greta Gerwig, Tracy Letts, Zosia Mamet. Festival de Deauville 2016. Sortie française le 19 octobre 2016.

visuels: affiche, photo et bande annonce officielles du film.

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Olivia Leboyer
Docteure en sciences-politiques, titulaire d’un DEA de littérature à la Sorbonne  et enseignante à sciences-po Paris, Olivia écrit principalement sur le cinéma et sur la gastronomie. Elle est l'auteure de "Élite et libéralisme", paru en 2012 chez CNRS éditions.

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