Théâtre
14 ème  édition du festival “A VIF ” de Vire

14 ème édition du festival “A VIF ” de Vire

10 May 2023 | PAR David Rofé-Sarfati

Le festival du spectacle vivant de Vire “A Vif” fête cette année son 14e édition. Le festival dédié à l’adolescence propose une programmation diversifiée. Les ados étaient au rendez-vous avec leur curiosité et leur bouillonnement.

Il y avait ce 9 mai une ambiance de rentrée scolaire ou de résultats du bac. Le parvis du Centre dramatique de Vire (Le préau, directrice Lucie Berelowitsch)  était noyé par des lycéens et lycéennes. Une foule d’adolescents, issue des terminales de lycées de Vire, du Havre, de Caen et d’Alençon s’agglutinait autour de deux estrades. La façade du Théâtre, face à nous, se décorait de rose. Des baraques offraient boissons et sandwich. Chacun à sa tâche. Le ciel même accepta sa part et su être clément. Sur une estrade un orchestre pop, sur l’autre une scène. Sur cette scène, Lucie Berelowitch armée de son sourire, lance le festival pour laisser place à un spectacle imaginé par des lycéens de classe théâtre. L’ambiance est à la déconne, mais attentive. L’édition 2023 s’intitule Métamorphoses. Les lycéens proposent ainsi une réflexion autour du thème.  Le texte écrit par les adolescents se veut manifeste, exploration. Il saura être poétique et les apprentis comédiens merveilleux à la tâche. 

L’inauguration du festival finira avec deux chansons interprétées pas les DakhaBrakha, groupe musical ukrainien. Ainsi a commencé le 14e festival A VIF dans la joie et le foisonnement. Chacun des spectacles de la programmation questionne à sa façon les rites de passages, les transformations, les différentes mues que l’on traverse à l’adolescence, mais aussi à l’âge adulte.

Nous avons vu : 

Dans ta peau

Conte fantastique écrit avec l’auteur-compositeur Romain Tiriakian, Dans ta peau aborde la longue quête pour se trouver soi-même. Lorsque son amour, leader de son groupe de musique, disparait sans laisser de trace, Sybille loue un appartement pour s’y enfermer. Ce lieu va agir comme un révélateur : depuis qu’elle est enfant, elle entend une voix au fond d’elle qu’elle a toujours cherché à faire taire. Cette voix va prendre les commandes de sa vie. 

Cette pièce musicale fonctionne comme un opéra rock. Les personnages réels ou irréels sont fantasques, merveilleux. L’histoire est sombre cependant que le drame déplie l’éternelle question prégnante chez les ados de savoir repérer dans les multiples avatars sociaux de soi-même et de l’autre celui qui parle vraiment, celui qui résiste à l’illusion de la mascarade sociale. Si la pièce raconte un travestissement, elle récapitule les masques des identifications et des séparations.  Le texte de Julie Me?nard fait résonner les vibrations de l’adolescence tandis que la scénographie de Camille Duchemin épouse le trait fantastique du geste. La pièce réussie déchaine l’enthousiasme des ados dans la salle. 

Pénélopes 

Avec Pénélopes, Céleste Germe utilise la figure de la légendaire épouse d’Ulysse et la démultiplie en héroïnes anonymes contemporaines. Elle a collecté des témoignages de femmes plus ou moins emprisonnées dans le carcan invisible du patriarcat et nous livre dans une pluralité de portraits, les signes discrets ou pas d’une résistance.  Celeste Germe est formidable. Elle est une comédienne de grand talent et sait porter avec une générosité rare des paroles épaisses. Elle restitue les faux semblants, les rages ou les complaisances avec la même authenticité. Elle ne juge jamais. C’est ici sa vertu et la puissance de son geste. 

Le collectif DAS PLATEAU qui porte ce projet cite la profession de foi de Claudine Galléa : 

Je crois que le geste artistique est toujours une révélation de ce qui diverge, diffère du consensus. Mais ce “différent” qu’on montre est à mon sens commun à beaucoup, sinon à tous. Je crois qu’on écrit pour dire ce qui trouble. Le trouble, c’est ce que l’ordre social familial ne traite pas. 

Nous aurons approché ce trouble si édifiant. 

Maryvonne

Suite logique et quasi évidente de Pénélopes, Maryvonne, théâtre documentaire de Camille Berthelot autour de son énigmatique grand-mère, installe un dialogue intergénérationnel sur la position de la femme. Par une scénographie inédite, le public est saisi, l’interprétation engagée et tout en finesse. On oscille entre rires, sourires et au final quelques larmes d’une émotion qui déborde. 

 

Festival A VIF

Du 9 au 17 mai
Vire & Bocage
 

Visuel  Affiche

Crédit Photo CDN VIRE

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David Rofé-Sarfati
David Rofé-Sarfati est Psychanalyste, membre praticien d'Espace Analytique. Il se passionne pour le théâtre et anime un collectif de psychanalystes autour de l'art dramatique www.LautreScene.org. Il est membre de l'APCTMD, association de la Critique, collège Théâtre.

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