Opéra
“L’Annonce faite à Marie” par Philippe Leroux et Célie Pauthe, aux fondations de la cathédrale

“L’Annonce faite à Marie” par Philippe Leroux et Célie Pauthe, aux fondations de la cathédrale

05 October 2022 | PAR La Rédaction

Alors qu’Angers Nantes Opéra s’apprête à présenter…s’apprête à accueillir la première de la création mondiale de L’Annonce faite à Marie, composée par Philippe Leroux d’après la pièce mythique de Paul Claudel, nous avons rencontré le compositeur et la metteuse en scène Célie Pauthe pour entrer dans les coulisses de ce grand évènement.

Par Angélique Dascier.

Philippe Leroux, Célie Pauthe, l’opéra, est-ce une aventure nouvelle pour vous ?

Célie Pauthe : J’ai déjà mis en scène la Chauve-souris il y a trois ans. On ne peut pas imaginer planète plus lointaine. C’est une deuxième aventure dans le monde de l’opéra, mais une toute première dans l’univers, évidemment de Philippe, et d’un opéra totalement professionnel puisque cette première se passait dans le cadre de l’Académie de l’Opéra de Paris, donc avec des chanteurs en formation.

Philippe Leroux : cela fait longtemps que j’y pensais. Quand j’ai lu cette pièce de Claudel, j’ai trouvé le texte qui me convient car on y trouve une dramaturgie extrêmement forte. Il est très riche au niveau poétique, au niveau des images, au niveau des sonorités vocales, du rythme, des vers. Il me convenait parce qu’on y trouve tout ce qu’il faut pour faire un opéra : de la passion, de la jalousie, même un meurtre et la dimension spirituelle qui moi me touche assez fort. J’y ai vraiment trouvé tous les ingrédients pour pouvoir bien travailler. Et c’est rare d’avoir tout cela à la fois dans un texte. Ce n’est pas commun. Lorsque j’ai lu ce texte, je me suis dit : « c’est ça ».

Concrètement, comment l’idée a-t-elle fait son chemin jusqu’à Angers Nantes Opéra et comment s’est construite l’équipe de cette œuvre ?

PL : j’en ai parlé à mon éditeur, lorsque j’ai trouvé le texte car cela faisait longtemps qu’il m’encourageait à composer pour l’opéra. Mon éditeur, Christophe Dardenne, des Editions Billaudot, a contacté Alain Surrans, directeur de Angers Nantes Opéra, qui s’est montré très intéressé. J’avais déjà en tête l’idée de faire appel à Raphaèle Fleury en qualité de librettiste, qui a également signé le livret du Soulier de satin de Marc-André Dalbavie (NDLR création 2021 de l’Opéra de Paris) et que je connaissais déjà.
C’est Alain Surrans qui m’a parlé de Célie et j’ai découvert son travail, que j’ai beaucoup aimé. Je suis allé voir Bérénice (NDLR mis en scène par Célie Pauthe en 2018 au CDN de Besançon Franche-Comté). On s’est très bien entendus dès le début et on s’entend encore très bien. Ce qui est assez exceptionnel.

Pour vous, Célie Pauthe, si cette mise en scène n’est pas une première pour l’opéra c’est en revanche une première pour un opéra dont la partition est en cours de création…

OL : partition que j’ai terminée fin juin, ce qui donne une idée de l’immensité du challenge…

CP : je ne l’ai pas vécu comme ça, c’est marrant..

PL : parce que j’ai travaillé petit à petit, on communiquait, j’ai enregistré… mais quand même, tu as tout monté, comme ça…

CP : … en même temps, c’est une espèce d’imaginaire incroyable. On était en contact très régulier. Philippe me racontait la musique avant que je puisse l’entendre. Et ça c’était extraordinaire, de pouvoir, à travers même une sémantique, une langue, celle de Philippe, découvrir la musique et comprendre aussi cette sorte de corps-à-corps avec les mots, les personnages… Je ne suis pas musicienne, mais j’entrais quand même dans les fondations de la cathédrale.
Philippe Leroux : oui tout à fait et cela crée des liens. Quand on se voyait, je chantais des petits passages, j’allais au piano jouer des trucs, je déclenchais un fichier sur mon ordinateur. J’essayais d’expliquer ce que la musique serait. C’est très curieux comme travail.

CP: ça a été un processus, une genèse infiniment nourrissante pour moi, même si en effet j’ai découvert l’ensemble de la musique tardivement. Mais la première chose que je savais, un des préalables de notre toute première rencontre, c’est que Claudel serait présent.

Ce choix qu’on entendrait la voix de Claudel a été déterminé très vite entre vous ?

PL : c’est moi qui ai tout de suite voulu ça. Ce choix se justifie le plus par le fait que L’Annonce faite à Marie est une sorte d’ « autobiographie indirecte » de Claudel, Célie, tu en parleras mieux que moi… Dans ma production vocale, j’ai souvent fait intervenir les poètes avec qui je travaillais parce que j’ai un jour été très marqué d’entendre Le Pont Mirabeau dit par Apollinaire et le discours d’André Malraux pour l’entrée de Jean Moulin au Panthéon. Le fait de pouvoir maintenant enregistrer donne un rapport au temps différent. On peut faire revenir des morts d’une certaine façon. Il y avait aussi cette idée de faire une irruption de l’Histoire de la littérature dans l’opéra. Et j’aimais bien l’idée que Claudel puisse être là, non pas comme un censeur, mais comme un ami des chanteurs, des musiciens ; être là comme s’il écrivait son texte, comme s’il en faisait des commentaires.

Et cette idée, Célie Pauthe, vous vous en êtes emparée pour la mise en scène…

CP : cela a été l’enclenchement du projet à la fois de mise en scène et de scénographie ; l’un des points de départ d’une « autobiographie indirecte » comme tu le dis Philippe. Je ne t’avais jamais entendu dire cela, mais je suis tout à fait d’accord avec toi, même si Claudel lui-même ne le confirmerait pas ; lui qui a passé sa vie à jouer au chat et à la souris entre ce qui était vraiment biographique et ce qui ne l’était pas, à ne jamais vouloir gloser sur l’aspect biographique de son œuvre. Néanmoins, beaucoup de critiques s’en sont emparés car évidemment la vie de Claudel est une matière qui donne beaucoup à penser et son œuvre en est pleine. L’Annonce faite à Marie est une pièce sur laquelle il a passé 56 ans de sa vie à revenir, certes pas en continu, mais cela reste impressionnant. Il en a écrit six versions et de multiples variantes. C’est une œuvre qui l’a poursuivi. Il dit de cette œuvre : « c’est un drame qui domine au fond toute mon existence ». C’est une histoire inscrite dans l’histoire de sa propre famille dont on retrouve beaucoup de composantes, de drames. La proposition de Philippe de faire intervenir Claudel lui-même offrait un champ de mise en abîme à la fois poétique et ludique. De là l’idée est venue que l’histoire se déroule comme dans la chambre d’écho du bureau de Claudel. Bien évidemment c’est une transposition. En outre, l’objet livre lui-même est là et les chanteurs le citent, s’en emparent, un peu comme si les personnages venaient rouvrir ce bureau mental plein d’obsessions, riche d’une vie entière qu’ils allaient redéplier avec nous et en présence de la voix de Claudel qui accompagne chacun d’entre eux. Philippe, tu le fais intervenir comme un fil rouge et tous les personnages sont concernés par son intrusion…

PL : …il est là pour les aider et parfois il les provoque pour les faire accoucher de ce qu’ils sont.

CP: il y a une sorte de malice par moment…

PL : oui voilà c’est ça, de l’humour….

On entend donc la voix de Claudel dans cette création. Pour concrétiser cette prouesse technologique, vous avez travaillé à la modélisation de sa voix avec l’IRCAM, pouvez-vous nous parler de ce travail ?

PL : on y a travaillé dès le début. On ne savait pas du tout si cela fonctionnerait. On dispose de très peu d’enregistrements de la voix de Claudel et ceux dont on dispose ont été réalisés alors qu’il avait un âge avancé et des difficultés à articuler. En outre, dans les prises de son des années 50, on entendait beaucoup de bruit derrière les voix. Resynthétiser cela en pouvant penser que c’était lui, ce n’était pas un pari gagné. On a essayé de travailler avec une technologie par réseaux de neurones, par synthétiseurs neuronaux ; donc une technologie complexe. On s’est tout de même dit que si cela ne fonctionnait pas, on travaillerait avec un comédien qui imiterait la voix de Claudel que nous retravaillerions avec des filtres. Mais finalement, on n’en a pas eu besoin. Au fur et à mesure, on a amélioré la technologie et à l’arrivée, on reconnait parfaitement sa voix. Si on écoute la voix sans rien, sans environnement sonore, on entendra de tous petits artefacts sur certaines syllabes mais presque rien. Et c’est bien aussi parce qu’on resynthétise, mais on ne peut pas arriver à l’original. L’original c’est autre chose, j’aime bien cette idée-là.
Beaucoup de gens autour de moi m’ont encouragé à faire dire des trucs incroyables à Claudel, mais il n’en était pas question. Je ne voulais surtout pas lui faire dire des choses qu’il n’aurait jamais dites. Là, je lui fais dire des choses qu’il a écrites, alors c’est vrai qu’il ne les a pas dites, mais il les a écrites. Cela reste relativement honnête par rapport à lui. Je n’ai surtout pas voulu aller plus loin. Dans l’opéra, les tous premiers mots comme les tous derniers, sont vraiment de sa voix à lui et le reste c’est une synthèse de sa voix.

CP: sauf le petit oiseau…

PL : oui, on a ajouté deux incrustations de sa voix réelle dans lesquelles il chante, on l’entend qui chante et on entend le metteur en scène qui travaillait avec lui à ce moment-là et les comédiens qui interviennent et hop ça disparaît…

Célie Pauthe, pour les besoins de la mise en scène, vous avez choisi de filmer le Tardenois…

CP : l’imaginaire s’est enclenché à partir du même embranchement. On est partis dans ce pays pas très lointain, pas très exotique. Claudel en parle beaucoup. Même s’il a fait le tour du monde et qu’il s’en est échappé dès qu’il a pu, il est beaucoup revenu, dans son œuvre, sur cette terre où ont baigné son enfance et son adolescence, une terre enracinée dans la famille. Beaucoup des noms des personnages ont un lien avec ces lieux, par exemple, Violaine est le nom d’un village du Tardenois et beaucoup de noms cités sont des noms de territoires de ce pays-là, un pays de vent, de labour, de cathédrales pour seul horizon… également une terre de légende, effrayantes pour certaines, qui a beaucoup inspiré L’Annonce faite à Marie. Un pays qu’il a beaucoup arpenté avec sa sœur, Camille. Lui-même dit à quel point c’est une terre qui l’a pétri. On a trouvé important d’aller filmer ces paysages d’autant que la pièce est construite avec le rythme des saisons. La saisonnalité, d’hiver en été, le cycle de la vie. L’idée est venue de la musique, dès le prologue.
A propos de la musique, deux choses m’ont profondément marquée, comme des brèches. D’un côté, les Grégoriens déjà présents dans le texte de Claudel et qui deviennent dans la musique de philippe des moments très forts, une sorte de réinvention du Moyen-Âge. Claudel lui-même en fait sa didascalie de départ. Ces Grégoriens forment des moments suspendus, une sorte de « verticalité suspendue » et évoquent un temps où le temps peut se déployer autrement.
D’un autre côté, les récitatifs m’ont beaucoup fait rêver. Ici, les personnages parlent, mais il ne leur reste plus que des mots. Les phrases elles-mêmes sont déconstruites, comme des poches d’inconscient, de rêve où juste quelques mots resteraient, où on essaierait de réassembler une pensée qui n’arriverait plus à se donner intégralement. Ce sont des moments que j’ai trouvés infiniment poétiques et c’est cette réflexion-là qui a accompagné l’image. L’image a pu s’infiltrer dans la musique pas ces brèches-là.

Philippe Leroux, comme vous l’avez fait dans certaines de vos précédentes pièces, avez-vous travaillé autour la musique du Moyen-Âge pour cet opéra ?

PL : oui et de beaucoup de façons. D’abord on retrouve dans le texte de Claudel de nombreuses citations de chants grégoriens dans le texte de L’Annonce faite à Marie, des chants entiers, l’intégralité des hymnes. Dans le troisième acte, on entend des lectures. J’ai là aussi repris des tons de lecture grégoriens qui sont travaillés, mais qui sont bien ceux qui se faisaient à l’époque. De purs moments de Grégorien : par moment l’hymne grégorien, à d’autres moments du Grégorien mélangé à lui-même, une sorte de recomposition polyphonique du grégorien ou encore des moments d’écriture nouvelle dans l’esprit des neumes du Grégorien. On y retrouve alors le phrasé avec une écriture plus moderne. Cette approche est basée sur la récitation, d’ailleurs, un point commun avec Pélléas de Debussy, est le fait que je travaille énormément sur des teneurs, sur des corps de récitation desquels on s’échappe. Cela fait également référence au chant grégorien, au mode ecclésiastique de l’époque. Plus tard, au quatrième acte, on entendra aussi des sortes d’organums, certes plus tardifs dans l’histoire de la musique, mais néanmoins médiévaux.
J’ai énormément travaillé sur cette musique médiévale qui a été déterminante dans l’élaboration de ma vision compositionnelle.
J’aimerais revenir sur notre collaboration avec Célie Pauthe. Nous avons quelque chose en commun qui est très fort je crois. On s’est vraiment intéressés, tu me dis si je me trompe, mais à creuser la psychologie, les émotions, les affects des personnages. On est entrés assez profondément dans cette brèche.

CP: pas forcément dans la même temporalité parce que Philippe avait un temps d’avance sur moi. D’autant plus en la découvrant au plateau tous les jours en répétition, j’ai vraiment été très émue d’entendre à quel point Philippe, en composant, tu étais allé creuser les affects les plus profonds, comment tu les as écoutés ces personnages, dans leurs conflits, dans leur lumière. Je ne sais pas si tu serais d’accord avec ça Philippe, c’est une musique qui sert le texte. J’allais dire une musique dramaturgique, mais ce n’est pas adéquat. Même si je trouve ce mot très beau, ce n’est toutefois pas un mot musical. La musique de Philippe donne l’impression de creuser l’œuvre dans ses propres fondations, dans la psychologie, dans tout ce qui lie les personnages les uns aux autres aussi, dans la puissance émotionnelle des relations entre eux qui est tout à fait singulière en fonction de chaque couple que l’œuvre provoque ou déchire.

La lumière dans vos choix de mise en scène a-t-elle été traitée de manière spécifique ? avez-vous exploré ce lien entre la lumière et la cathédrale, le personnage de Violaine ?

CP : l’espace qu’on a conçu est une grande enceinte percée de brèches, de quelques ouvertures, qui permettent de faire passer la lumière par endroits, mais qui ne la donnent pas toute. Notre travail s’est beaucoup concentré sur la vidéo et sur la manière dont cette enceinte est traversée par la lumière. On a beaucoup travaillé avec l’ombre et le soleil directement, avec des clairs-obscurs et des contrejours assez forts et sur cette bataille entre l’ombre et la lumière que l’œuvre contient si puissamment.

PL : et les costumes aussi sont liés à cette question de la lumière….

CP : oui tout à fait. Anaïs Romand a beaucoup travaillé sur les vitraux du Moyen-Âge pour en tirer les lignes d’inspiration médiévale dont on a gardé une forme d’épure. Elle a travaillé sur les couleurs des vitraux notamment.

PL : pour revenir à la psychologie des personnages, Célie a réussi à faire quelque chose qui n’est pas redondant avec la musique, sans superposition, sans redite entre nous ; comme si nous avions abordé des angles différents pour creuser le psychisme de chacun. On arrive à ne pas se marcher sur les pieds, ce qui n’était pas évident parce que la musique est très active. Même si parfois on y trouve des temporalités très lentes, il se passe beaucoup de choses. Ce devait être un sacré challenge je pense…

CP : l‘équipe de chanteurs et de chanteuses se sont prêtés au jeu théâtral et d’interprétation d’une manière très belle. On a pu partager dès le début des enjeux dramaturgiques profonds. J’ai fait avec eux un travail exactement de même nature qu’avec des acteurs qui ne sont pas en plus chanteurs. C’était beau de pouvoir partager profondément avec toutes et tous. Par exemple avec Raphaèle Kennedy, ce par quoi Claudel fait passer ce personnage de Violaine est tellement extrême par certains côtés qu’il ne faut pas se tromper. On peut prendre de mauvais embranchements dans beaucoup d’endroits. Le rôle de Violaine est particulièrement difficile pour garder la lumière à l’endroit juste et ne pas tomber dans l’écueil d’une forme de vision d’une sainte, l’imagerie d’une béatitude alors que ce n’est pas cela du tout, c’est évidemment beaucoup plus complexe que ça comme le sont tous les personnages de Claudel. Ça a été très bon de pouvoir partager cette profondeur et cette richesse avec eux tous. Ils ont tous été fabuleux.

Pouvez-vous évoquer la temporalité de la création ?

PL : j’ai commencé à évoquer cette pièce avec Alain Surrans il y a cinq ans. L’écriture de la pièce a duré trois ans. La création aurait dû avoir lieu l’an dernier. La crise sanitaire m’a permis de repousser d’un an la création. Au départ c’était très court.

CP : j’ai commencé à travailler il y a trois ans. C’est une longue genèse…

Est-ce vous, Philippe Leroux, qui avez choisi l’ensemble Cairn pour créer cet opéra ?

PL : ce choix de l’ensemble Cairn a été discuté avec Alain Surrans. C’est un excellent ensemble, ils sont bluffants. Ils sont arrivés hier et waouh, ça joue, c’est précis, il y a des couleurs, c’est vraiment superbe.

Quand les répétitions ont-elles débuté ?

PL : les répétitions ont débuté le 1er septembre à l’opéra. L’ensemble Cairn est arrivé hier, mais les musiciens ont répété ensemble toute la semaine. Depuis 3 ans, chance incroyable, à chaque fois que je terminais un acte, on l’enregistrait. Comme la formation n’est composée que de huit instrumentistes et électronique, on pouvait enregistrer à l’IRCAM les huit instruments ce qui constituait un déchiffrage un peu amélioré de tout l’acte. Ainsi, à chaque étape nous disposions d’un enregistrement de la pièce comme si elle avait été jouée. C’était très utile pour Célie, pour les chanteurs, pour les répétitions piano-chant. Au lieu d’avoir un piano dont le son n’aurait rien eu à voir avec ce qu’on va réellement entendre.

Avez-vous assisté aux répétitions de Cairn ? vous avez pu les guider ?

CP : J’avais déjà un peu travaillé avec eux à chaque fois qu’on faisait les enregistrements dont j’ai parlé tout à l’heure, mais là non. Je les ai laissés travailler sans moi, j’ai une confiance absolue dans le travail de Guillaume. La preuve, c’est parfait.
PL : C’est une musique virtuose. Pas trop pour les chanteurs, bien qu’ils ont beaucoup de texte à mémoriser, mais ce n’est pas aussi virtuose que certaines pièces que j’ai pu écrire pour la voix.
L’ensemble Cairn est un petit orchestre : flûte, clarinette, trompette, un cuivre, piano, percussions, deux cordes, guitare électrique et toute la richesse de l’apport de l’électronique.

Avez-vous prévu d’intégrer les lettres de L’Annonce faite à Marie dans votre grande phrase, celle qui sera formée par l’ensemble des œuvres de votre Œuvre ?

PL : non, mais j’ai vraiment bien travaillé avec les lettres. Je suis parti d’une des phrases de l’annonce : « moi je rentre dans la nuit par-dessus ma nuit pour t’écouter ». On est allés chercher le manuscrit de Claudel à la BNF, on a découpé chaque lettre de cette phrase dessinée de la main de Claudel et chaque lettre a servi de modèle pour générer des profils mélodiques, des rythmes. En retraçant, en suivant exactement le contours de sa graphie, en retraçant les lettres, on a capturé la vitesse du tracé, la pression du crayon, toutes sortes de paramètres qu’on a transposés en données plus directement musicales de hauteurs, de rythmes, de transformations, de timbres… J’ai déjà utilisé cette phrase dans une autre pièce dans laquelle les musiciens tracent des lettres en même temps qu’ils jouent. J’avais déjà exploré cela.

CP : dans Voi(REX) aussi…

PL : oui dans Voi(REX) aussi, mais ce n’était pas sur un texte de Claudel, c’est une pièce entièrement créée sur la graphie des lettres du poète Lin Delpierre. Voi(REX) sera d’ailleurs joué samedi par l’ensemble Utopik au Conservatoire de Nantes*.

Cette fameuse phrase est-elle terminée ?

PL : non, il me reste encore 4 pièces à écrire.

Y a-t-il quelque chose que vous voudriez ajouter sur cette pièce que je n’aurais pas suscité par mes questions, mais qui vous tiendrait à cœur ?

PL : le très beau travail avec les deux chefs d’orchestre : Guillaume Bourgogne, qui dirige l’ensemble Cairn et qui dirigera les représentations et Rémi Durupt, qui a assuré en qualité de chef assistant, les répétitions, la pré-générale piano-chant et qui a fait un travail formidable. Guillaume Bourgogne a préparé l’ensemble Cairn. Ils sont arrivés hier et c’est formidable, c’est d’une précision incroyable, plein de phrasé, de couleur… un superbe travail de chef.

[* Concert de l’ensemble Utopik, Auditorium Debussy, Conservatoire de Nantes, samedi 8 octobre à 17h. Programme : AAA, Voi(REX), Ma Belle su tu voulais et Histoires Anciennes ]

L’Annonce faite à Marie [Création mondiale], Philippe Leroux d’après Paul Claudel, Commande // Nantes-Angers Opéra ; Coproduction // Angers Nantes Opéra, Opéra de Rennes, Ircam-Centre Pompidou. Avec le soutien du Fonds de création lyrique (SACD).
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Nantes – Théâtre Graslin // dimanche 9 octobre à 16h (garderie gratuite à partir de 3 ans), mardi 11, jeudi 13 et vendredi 14 octobre à 20h. https://www.angers-nantes-opera.com/l-annonce-faite-a-marie
Opéra de Rennes // dimanche 6 novembre à 16h, mardi 8 et mercredi 9 novembre à 20h. https://www.opera-rennes.fr/fr/evenement/lannonce-faite-marie
Angers – Grand Théâtre // samedi 19 novembre à 18h (garderie gratuite à partir de 3 ans). https://www.angers-nantes-opera.com/l-annonce-faite-a-marie

Durée : 2h30
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Musique – Philippe Leroux ; Direction musicale – Guillaume Bourgogne ; Mise en scène – Célie Pauthe ; Livret Raphaèle Fleury d’après l’œuvre de Paul Claudel
Distribution : Violaine Vercors – Raphaële Kennedy, soprano ; Mara Vercors – Sophia Burgos, soprano ; Elisabeth Vercors – Els Janssens Vanmunster, mezzo-soprano ; Anne Vercors – Marc Scoffoni, baryton ; Jacques Hury – Charles Rice, baryton ; Pierre de Craon – Vincent Bouchot, ténor
Ensemble Cairn

visuels (c) Delphine Perrin

Avec Rituel 5, parler de la Mort ne fait pas peur
75070 à la Yellow-Cube Gallery
La Rédaction

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