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Lignes brisées et apocalypse à « Vive le sujet ! »

Lignes brisées et apocalypse à « Vive le sujet ! »

10 July 2023 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Chaque année, le programme conjoint entre la SACD et le Festival d’Avignon s’amuse à changer de nom. En 2023, il voit plus grand en devenant « Vive le sujet ! Tentatives ? ». Au programme de la série 1, le pas de deux très écrit d’Auguste de Boursetty, Alex Freiheit et les incantations de Daniely Francisque et Mawongany.

La première proposition, What will remain secret – Ce qui restera secret, commence par un numéro de contorsion. Les deux interprètes évoluent l’un .e à travers l’autre en « chien tête en bas » et en « pont » aux lignes très profondes et dessinées. La pièce pourrait juste être un éloge de la géométrie. Iels sont tout.e les deux vétu.es de costumes bleus. L’un est composé d’un pantalon et l’autre d’un short si large que l’on dirait une jupe. Cette distinction n’est pas vaine puisque toute la proposition parle de la question de l’identité de genre. Iels sont des enfants, on le comprend à leur allure, à leurs gestes qui rappellent les cours de récré. On met un doigt dans la bouche pour faire claquer la joue par exemple. La danse se déroule au son d’un texte enregistré qui nous amène peu à peu à comprendre que ce duo veut nous montrer qu’iels sont les « effacé.e.s, les secret.e.s ». Extrêmement bien écrit, très structuré, la proposition prend des allures presque classiques dans le champ contemporain. On ne va pas regretter que la danse, la plus engagée de surcroît, ne soit pas économe en matière de grammaire chorégraphique.

Comme toujours dans « Les sujets », les « tentatives » ne se ressemblent pas dans leurs esthétiques, mais elles sont souvent reliées entre elles. C’est le cas pour ce premier programme. Dans AMP?WA !, qui lui aussi nous raconte une histoire de mue, il n’est pas question de changer de genre mais plutôt de se libérer des assignations faites aux femmes. Daniely Francisque apparaît comme une déesse, le pas lourd. Elle est chargée de talons carrés, et d’un casque très imposant. Accompagnée par le musicien Mawongany qui fait son de tous les bois possibles, elle se dépouille en balançant un texte ciselé sur le féminisme. Dans un flot vibratoire, elle ordonne aux hommes : « Débranche-toi de ma vulve ! », elle affirme aussi : « Ici, on tue ses larmes. »

Un programme 1 cohérent donc et qui montre une nouvelle fois la capacité des interprètes à créer des rencontres au-delà de leur champ de travail habituel.

Lignes brisées et apocalypse à « Vive le sujet ! » © Christophe Raynaud de Lage

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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