
Doug Elkins à Suresnes : un retour aux sources survitaminé
Suresnes cités danse a son mythe fondateur : en 1992, Olivier Meyer assiste à un spectacle de Doug Elkins, et c’est le coup de foudre. Dès ce moment, il est déterminé à offrir une scène aux hip hopeurs – le festival était né. Vingt ans plus tard, Doug Elkins nous présente une nouvelle création, Mo(or)town / Redux, et reprend une de ses pièces mythiques, Scott, Queen of Marys (1993).
Mo(or)town / redux
Au pays des crooners et du cabaret, Doug Elkins n’hésite pas à s’inviter sur la piste en piquant son mouchoir fatidique à Othello. Et voilà comment deux danseuses en robes trapèze et pieds nus se retrouvent à mimer la jalousie avec leurs partenaires chaussés de vans. Dans une ambiance disco, portés par une bande-son anthologique (de Marvin Gaye à Stevie Wonder en passant par Amy Winehouse), les couples s’étreignent et se déchirent avec entrain.
Si l’interprétation est parfois inégale, les pas de deux masculins font mouche et le contraste entre les passions racontées et le ton très “couple contest” du samedi soir est souligné par une chorégraphie qui s’appuie sur la puissance physique de ses interprètes.
Scott, Queen of Marys, 1993
Dès le début, les dés sont pipés : dans un jeu de mot queer malin, Scott, Queen of Marys renverse le nom d’une très sérieuse reine écossaise du XVIe siècle – Mary, Queen of Scots. De cette époque compassée et corsetée, le chorégraphe hip hop newyorkais ne conserve que la cornemuse et quelques pas de menuets (si, si), pour mieux rendre hommage à la scène gay des eighties et au voguing.
Mais si, vous connaissez… Souvenez-vous, dans son clip Vogue en 1990, Madonna mettait en scène le fameux Willi Ninja, à l’origine de ce détournement des codes du catwalk par les gays. Le danseur était la figure de proue des clubs gays de Harlem, fréquentés par des homosexuels latino-américains et afro-américains.
Willi Ninja n’est plus, mais Javier “Ninja” Madrid fait des merveilles dans son rôle, frêle silhouette androgyne aux bras longilignes, moulée dans un maillot de corps jaune fluo. Sur une musique de Mio Moralès, qui fait la part belle aux synthés, Javier défile et se déhanche comme pas permis. La chorégraphie, très graphique, use et abuse des diagonales et nous livre quelques-uns de ces pas de deux gays sauce hip hop dont Elkins a le secret.
Vous en voulez encore ? Alors n’attendez pas, découvrez Paris is burning (1990), documentaire de Jennie Livingston qui retrace l’histoire de la ball culture new yorkaise, autour de Willi Ninja.
Crédits photographiques © David Bazemore et Julieta-Cervantes
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