Danse
Cinédanse : Alice Guy, la femme à la caméra

Cinédanse : Alice Guy, la femme à la caméra

05 January 2022 | PAR Nicolas Villodre

Le documentaire actuellement programmé par la chaîne culturelle, Alice Guy, L’Inconnue du 7e Art, nous permet d’évoquer la créativité dans le domaine de la cinédanse de la première femme scénariste, cinéaste et productrice de films.

Miroir aux Alouettes

Alice Guy (1873-1968), qui venait d’être formée à la sténo-dactylo (un métier alors réservé… aux hommes), se souvient de l’hésitation de Léon Gaumont (1864-1946), le nouveau directeur du Comptoir de la photographie de Félix Richard, lors de son entretien d’embauche, en 1894 : “Vous êtes jeune.- Ça me passera!” La jeune femme fut engagée et cumula la fonction de secrétaire et, à son initiative, celle de réalisatrice des démos destinées à promouvoir le Biographe récemment acquis par la société Gaumont,  une caméra 58 mm conçue par Georges Demenÿ, l’ex-assistant d’Étienne-Jules Marey, frère de Paul (poète et ami proche de Rimbaud), par ailleurs, réformateur français de la danse rythmique et maître à penser d’Irène Popard.

Si elle n’est pas la réalisatrice du premier film de fiction avec La Fée aux choux qui date, selon elle, de 1896, puisque L’Arroseur arrosé de Louis Lumière avait été tourné l’année qui précède, Alice Guy a innové en bien des domaines. Elle a dirigé à partir de 1897 les productions du studio Elgé (L.G., comme Léon Gaumont), 14 rue des Alouettes, qui s’équipa d’une batterie de projecteurs électriques permettant de tourner quel que soit l’ensoleillement puis, dès 1902, a utilisé le procédé du film sonore du Chronophone. Alice Guy tourne une phonoscène dans les studios des Buttes-Chaumont (1907) l’atteste. Ce film, premier making of de l’histoire, autoréférentiel et publicitaire à la fois, est aussi un ciné-ballet. D’après le site GaumontPathéArchives, la troupe y porte les costumes de Roméo et Juliette.

Be Natural

Alice Guy consacra un certain nombre de bobineaux aux numéros de music-hall de Dranem et Mayol, aux danses serpentines de Lina Ébrard et Bob Walter, démarquées de celles de Loïe Fuller. Son opérateur Anatole Thiberville la fixa au milieu des Andalous à Grenade en 1905 et capta également des danses espagnoles et gitanes. En 2011, lors d’un programme au Musée d’Orsay qui fut consacré à la cinéaste, nous appréciâmes entre autres une pantomime, Danse des saisons (1900), Les Fredaines de Pierrette (1900), film en couleur avec une femme travestie en Pierrot embrassant Colombine, La Malagueña y el torero (1905), également colorié au pochoir et Saharet Boléro (1905).

Chargée avec Herbert Blaché de représenter la Gaumont en Amérique, Alice épousa son collègue et créa en 1910 sa propre société, la Solax, à Fort Lee, dans le New Jersey, qui était alors la Mecque du 7e Art avec des majors en herbe comme la Fox, Paramount, Metro-Goldwyn-Mayer, Universal. Alice réalisa et produisit seule puis avec son mari (à la fin du contrat le liant à Léon Gaumont) une longue série de films de fiction, de genres en vogue comme le western, mais aussi une œuvre singulière qui mérite d’être notée : A Fool and His Money (1912), entièrement interprétée par des acteurs noirs, cela sept ans avant les débuts d’Oscar Micheaux. Pour ce qui est de la direction d’acteurs, la consigne affichée dans le studio était claire : « Soyez naturel ». C’est tout ce qu’elle demandait à des comédiens issus du théâtre, donc surjouant. Be Natural fut sa marque de fabrique. 

Visuel : Alice Guy quelque temps avant l’invention du cinématographe. Fonds Alice-Guy Blanche Peeters.

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Nicolas Villodre

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