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Circus Baobab : Eau Yé!

Circus Baobab : Eau Yé!

16 April 2023 | PAR Nicolas Villodre

La Scala parisienne présente jusqu’au 5 mai 2023 le prodigieux spectacle Yé! (L’Eau! en langue soussou) donné par la troupe guinéenne du Cirque Baobab, ce qu’on peut voir de mieux en ce moment dans la capitale, du niveau des acrobates chinois jadis programmés par le cirque Phénix, pas si éloigné des shows contemporains de nos cousins canadiens.

Et du bonheur d’Arlequin

Ils sont treize à la douzaine, majoritairement du sexe anciennement dit fort – le quota féminin étant réduit à deux. Des artistes autant que des athlètes, de tout gabarit, ayant en commun leur origine guinéenne et leur ancien statut d’enfants de la rue, longtemps oubliés, insérés par des professionnels africains et français de haut niveau, rendus visibles par l’émission de M6, La France a un incroyable talent. Et, on est en droit de l’augurer, de plus en plus, en présentiel, en tournée dans l’hexagone et au-delà, suite à leur remarquable prestation à la Scala,.

L’argument de départ et le décor dépouillé du spectacle forment une parabole autour de l’eau, un peu comme ceux de la pièce Agwa de la Cie Käfig. Sujet brûlant d’actualité, surtout en Afrique noire, lié au réchauffement planétaire qui préoccupe les écologistes. De nombreuses bouteilles plastiques pour la plupart vidées de leur contenu jonchent l’arrière et l’avant-scène tandis qu’une source de lumière froide aveugle le spectateur par intermittence. La B.O. électro de Jeremy Manche est efficace, à base de basses, de percussions et de thèmes rappelant le boogie-woogie. La chorégraphie martiale de Nedjma Benchaïb complète la remarquable mise en scène, ou plutôt “mise en cirque” de Kerfalla Bakala Camara.

Prouesses à satiété

Deux difficultés majeures sont ici résolues : celle de faire simple, en premier lieu, puisque le spectacle ne compte que sur les propres forces du poignet et du reste du corps des artistes?; celle de faire du neuf avec du vieux. Cela les performers savent faire, qui méritent tous d’être mentionnés : Bangoura Hamidou, Bangoura Momo, Camara Amara Den Wock, Camara Bangaly, Camara Ibrahima Sory, Camara Moussa, Camara Sekou, Keita Aïcha, Sylla Bangaly, Sylla Fode Kaba, Sylla M’Mahawa, Youla Mamadouba, Camara Facinet. Car le résultat dépasse nos espérances.

Les numéros circassiens les plus traditionnels sont plus que “revisités” : ils sont révolutionnés par une troupe bourrée de talent et d’énergie qui les enchaînent sans temps mort une heure durant. En particulier les disciplines que sont le “main à main”, les portés, les pyramides humaines, les acrobaties de toute espèce et les contorsions grâce à un Valentin le désossé comme on n’en fait plus. Non seulement les élévations en forme de tours Eiffel faisant le grand écart ou les architectures éphémères transformant l’humain en pièce de Lego, mais aussi les chutes, brutales comme celles des cascadeurs de cinéma ou amorties par des bâches de pompier embourrées de bouteilles plastiques. Que d’eau, que de sauts, se dit-on après la routine finale.

Visuel : extrait du spectacle Yé! par le Baobab Circus © Metlili.net.

Jusqu’au 10 juin 2023 à La Scala, 13 boulevard de Strasbourg, Paris.

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Nicolas Villodre

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