Après l’océan : l’Afrique et ses doutes
En salles le 8 juillet, après l’océan pose sa caméra en Afrique et aux quatre coins de l’Europe pour suivre le destin de deux « frères », Otho et Shad. Compagnons clandestins en Espagne, l’un, Otho va se faire prendre et revenir bredouille au Bled, quand l’autre va “réussir” et rester: en Angleterre puis en France.
Après l’océan offre des thématiques intéressantes, surtout dans sa dernière partie. La réussite, l’européanisation des comportements et des styles : le personnage d’Otho, aigri par son retour manqué au pays s’indigne devant l’accueil réservé à l’autre fils prodigue, qui distribue billets et sourires en revenant. Cette tension entre l’espoir d’immigrer en occident, et la dépendance que crée l’argent des émigrés illustre bien un des problèmes majeurs de l’Afrique contemporaine. A travers Otho, Eliane de Latour fait passer un message fort : le besoin de créer et d’innover Africain, et de ne pas toujours céder aux leurres du rêve européen.
Cette conviction ne compense pas les faiblesses d’un long métrage qui prend trop de temps à contempler et envier les beautés de l’Afrique et des africains. Les images sont trop léchées, les plans trop amoureux. La force du propos se perd dans la multiplication de personnages secondaires à peine esquissés qui sonnent faux. Marie José Croze fait ce qu’elle peut pour incarner une française lesbienne émigrée à Londres qui prend Shad sous son aile. Malik Zadi cabotine à outrance dans le rôle de son frère, jaloux à en perde la raison. La réalisatrice capte mieux l’essence de l’Afrique, les questionnements culturels, et les difficultés des émigrés.
Trop lent, et manquant de rebondissements scénaristiques, Après l’océan est surtout trop pensé, trop réfléchi. Les dialogues, (entrecoupés d’expressions africaines bienvenues), soulignent un symbolisme déja très appuyé par les images. La métaphore du guerrier qui part rapporter du gibier et les déclarations sentencieuses ou philosophiques sonnent souvent faux dans la bouche de personnages qui tentent de s’en sortir comme ils le peuvent.
Après l’océan est donc un essai inabouti, traversé par quelques moments de grâce, et une conclusion très intéressante. A conseiller surtout aux amoureux de l’Afrique, ses couleurs, ses accents, et ses habitants. Pour les autres, préférez le CD de la bande originale, dont les accents traditionnels resteront plus longtemp à l’esprit (dans les bacs le 8 juillet).
Gilles Hérail