
“Premières dames” de Robert Schneider, de l’ombre à la peopolisation …
Robert Schneider a été chef du service politique de L’Express jusqu’en 1981, directeur-adjoint de la rédaction de France Inter jusqu’en 1986, puis rédacteur en chef et chef du service politique du Nouvel Observateur. Il est aujourd’hui conseiller de la direction de l’hebdomadaire. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Les Mitterrand (Perrin, 2009 ; Tempus, 2011), et Je serai président (Perrin, 2012). Au terme de plusieurs années d’enquête, Robert Schneider nous fait pénétrer l’intimité de ces huit femmes, loin des clichés sur papier glacé, loin des caricatures dont elles ont été victimes, loin aussi de l’image qu’elles ont tenté de donner d’elles-mêmes. Des portraits savoureux qui retracent un demi-siècle d’histoire contemporaine.
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Qu’y a-t-il de commun entre Yvonne de Gaulle, la prude, et Carla Bruni-Sarkozy, la délurée ; Anne-Aymone Giscard d’Estaing, la discrète, fille de la princesse de Faucigny-Lucinge, et Valérie Trierweiler, la twitteuse, fille d’une caissière de la patinoire d’Angers ; Bernadette Chirac, la catholique, née Chodron de Courcel, et Danielle Mitterrand, la laïque, fille d’instituteurs socialistes et francs-maçons ; Claude Pompidou, fidèle pendant trente ans à la mémoire de son mari, et Cécilia Sarkozy, qui a quitté le sien cinq mois seulement après son élection ?
Toutes ont connu un destin exceptionnel auquel elles n’étaient ni prédestinées ni préparées. Comment ont-elles vécu cette existence hors du commun, tenu leur place auprès du monarque républicain ? Quelle a été leur influence ? Pourquoi, à l’exception de Bernadette Chirac, ont-elles toutes été malheureuses à l’Élysée, ce palais prestigieux où elles étaient servies comme des reines ?
“Tout le monde est chez soi à l’Élysée, sauf nous”. Ces quelques mots d’Yvonne de Gaulle illustrent assez bien le vécu de ces premières dames de la République. A travers elles nous vivons l’histoire de la V ème république, une histoire voulue, une histoire subie, une histoire de femmes prisonnières, mais aussi actrices, qui savent tenir le premier rôle, le rôle principal, qui leur est offert. “Embrasse-moi (non pas comme ça) sur la bouche” murmuré par Valérie à l’oreille de François “Le Moi” Président symbole d’un XXI ème siècle de “peopolisation” dont nous ne remercions pas les protagonistes pour ce moment, mais qui suffisent à faire couler de l’encre sur une intimité publique égocentrique. L’Élysée, maison du malheur, de haine et d’amour, sphère domestique de “first ladies” qui ne sont rien, malgré les promesses d’une aventure extraordinaire où elles jurent de ne pas être des potiches, mais qui vivent tout de même comme des veuves au chômage… Première Dames, un livre émouvant, en attendant le Premier Homme…?
“Maintenant que vous êtes Première dame, de quoi avez-vous envie? – De ne plus l’être” Anne-Aymone Giscard d’Estain.
“Premières dames” de Robert Schneider, Perrin Éditions, aout 2014.