Les pissenlits, un inédit de Kawabata aux éditions Albin Michel
Roman inachevé du grand auteur japonais Yasunari Kawabata (1899-1972), “Les pissenlits” (1964) met en scène la longue conversation d’une mère et de son futur gendre aux alentours d’un hôpital psychiatrique où la jeune-femme qui les relie est internée. Un roman étrange, qui n’a pas la puissance de “Pays de Neige” (1961) ou de “Tristesse et beauté” (1981) mais qui plante une atmosphère fascinante.
La jeune Ineko ne s’est jamais remise de la mort de son père. Traumatisée, et se sentant coupable, elle développe une étrange maladie : elle a des moments où elle ne perçoit plus certaines parties de son corps ou de celui de son amant, Hisano. Après des mois de lutte, cet amant et la mère de Ineko décident de la faire interner dans un hôpital de province. Tous deux sont très choqués par cette décision. Laissant à contre-coeur Ineko passer la nuit seule dans son nouvel asile, ils font une longue marche jusqu’à leur auberge, au soleil couchant, et entourés de pissenlits en fleur. A cette occasion, leurs langues se délient de tout tabou, et tout se dit, même les corps qu’Ineko ne voit plus, en fulgurances de mémoires et de franchise.
Publié en feuilleton au milieu des années 1960 et jamais achevé, “Les Pissenlits” laisse donc le lecteur sur sa faim. Mais la traduction française de Hélène Morita permet de percevoir le climat surréaliste qui se dégage de ce livre étrange et paradoxalement prenant. On referme le livre sans en savoir forcément plus sur les personnages ou sur la folie, mais avec de nombreux éléments pour méditer sur le désir, la beauté et l’âge qui passe.
Yasunari Kawabata, “Les Pissentlits”, trad. Hélène Morita, Albin Michel, 264 p., 18 euros. Sortie le 1ier mars 2012.