
“Palais à volonté”, Mika Biermann grimpe les marches dans le désordre
D’origine allemande, l’artiste et écrivain marseillais Mika Biermann arrive chez P.O.L. avec un drôle de roman qui raconte une vie légèrement psychotique dans le bel ordre du chaos. Une expérience littéraire de l’ordre de la performance artistique.
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Un homme se confie à un psychiatre dans un asile, un autre (ou est-ce le même? ) vit de mille expédients pas tout à faits légaux, un dernier vit le fantasme (et la distopie) de se retrouver seul avec une femme très désirable, après un naufrage sur une île déserte.
Passant par fragments des situations les plus familières aux plus étrangement inquiétantes, Mika Biermann charcute l’unité de temps au scalpel le plus joueur. Les deux autres unités se retrouvent en lambeaux, suivant des lignes droites, épaisses mais inconciliables qui font penser aux voyages lointains qu’ont connu les rayures des marinières authentiques. Plongé dans la métaphore brute de décoffrage, libéré des conventions de l’intrigue, le lecteur se retrouve confronté à un texte d’autant plus prenant qu’il se repose sur ses seuls mots. Une expérience littéraire à la fois terriblement proche, sauvage et surprenante.
Mika Biermann, Palais à volonté, P.O.L., 192 p., février 2014.
“Au bout de trois jours elle commença à sentir. c’était sa manière de se venger. je l’enterrai dans le sable. En creusant avec les mains je tombai sur des ossements. peut-être un enfant, difficile à dire sans le crâne. le trou se remplit d’eau, je roulai son corps dedans, elle avait enflé, sa peau s’était couverte de marbrures; le sable avait pris une couleur rouille là où elle avait reposé.
Me voilà seul.
Les vraies victimes, c’est nous les survivants.” p. 167.