
“Moi, la grosse” de Matteo Cellini: derrière les apparences, la vie.
Professeur de littérature à Urbania, en Italie, Matteo Cellini signe ici son premier roman. Publié aux éditions Presses de la Cité, Moi, la grosse a déjà reçu le prestigieux prix Campiello du premier roman. Une distinction bien méritée.
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Caterina est une jeune italienne comme toutes les jeunes filles de son âge, chamboulée par l’adolescence et par ses 18 ans qui approchent. Si au sein de sa famille aimante, elle vie pleinement sa vie de Caterina, acceptée telle qu’elle est par les siens, au dehors, c’est une toute autre histoire.
Car hors les murs de la maison, Caterina a le même souci que toutes celles de sa catégorie poids lourd: elle perd tout simplement son identité pour se voir affublée du cruel sobriquet de “La grosse”. Adieu Caterina donc et bonjour l’angoisse. Le lycée, les autres, le regard et les moqueries. Mais comme Cat est une nana très intelligente et lucide, elle refuse de se laisser atteindre et telle une “supergirl” que personne ne soupçonnerait, elle s’invente des histoires, s’efface sans cérémonie, devenant invisible, croit-elle, au monde qui l’entoure. Jusque-là, tout marchait plutôt bien: pas d’amis, pas d’ennuis. Jusqu’au jour où ses parents, croyant bien faire, décident de lui organiser une fête pour son dix-huitième anniversaire.
“Je suis la possibilité permanente d’une comparaison flatteuse; celle qui vous retire des mains la palme de la plus moche, de la plus grosse, de la plus seule. Je suis Cate-la-grosse, un obus oublié qui, depuis le collège, ne demande qu’à exploser”.
C’est avec beaucoup d’intelligence et de sensibilité que l’auteur nous transporte dans les méandres de la vie bien difficile de la jeune Caterina. Le mal-être de cette adolescente obèse nous enveloppe littéralement et semble n’avoir aucun secret pour l’auteur de 35 ans. La vivacité d’esprit et le franc-parler du personnage apportent une vraie drôlerie au texte, sans jugement ni tabou. Si Caterina est tout au coeur du roman, l’auteur aborde aussi en filigrane les rapports familiaux, et par-delà les non-dits, toute l’immensité de l’amour filial. Un premier roman très réussi.
Moi, la grosse de Matteo Cellini. Traduit de l’italien par Marie Causse. Editions Presses de la Cité. Février 2015.Prix: 19€