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[Cannes, Semaine de la critique] « Hope » de Boris Lojkine: FORT

[Cannes, Semaine de la critique] « Hope » de Boris Lojkine: FORT

21 May 2014 | PAR Geoffrey Nabavian

Film sur la tentative d’émigration vers l’Europe d’un Camerounais et d’une Nigériane, Hope frappe. Sur ses protagonistes, comme sur le spectateur. Violence, pause, violence… et vérité, toujours. Des acteurs non-professionnels soutenus par une équipe de gens du cinéma combatifs et combattants: la recette d’un film qui emporte. Qui informe. Fort.

[rating=4]

La première scène de Hope, sèche et radicale, fait forte impression. Plus loin, l’arrivée dans le « ghetto camerounais » d’une ville du Sahara, frappe encore. Immédiatement, un affrontement verbal entre camerounais et nigérians fait le même effet. On se trouve à nouveau tenus en haleine lors de la présentation du patron du ghetto. Et ainsi de suite.

Léonard, « espoir de toute une famille » doit gagner l’Europe. Tout à coup, il se retrouve encombré de Hope, une nigériane, engagée dans le meme voyage, qu’il est contraint d’épouser lors de noces improvisées. Dès lors, les coups durs alterneront avec les instants plus doux. Avec, toujours en toile de fond, la question cruciale de l’argent.

Boris Lojkine, par son approche simple, dénuée d’artifices, parvient à convaincre. Son art du récit conduit à découvrir des réalités: ainsi, dans ces « bas-fonds de l’immigration », comme il les désigne lui-même, la seule valeur monnayable est ce que tu es, en tant que personne. Léonard va par exemple se servir de Hope pour récupérer l’argent que lui taxent les chefs des « ghettos », dans le Sahara comme sur les côtes d’Afrique du Nord. Or Hope ne peut se rendre utile que par la prostitution…

Aucun jugement n’a lieu, de façon à ce qu’on puisse s’attacher aux deux protagonistes (incarnés par Justin Wang, d’un naturel qui emporte tout, et par la jeune Endurance Newton, à la fois butée et désirable). Cette manière de peindre les personnages retient l’attention : chacun a ses raisons. Pas de manichéisme, dans ce monde-là. Même les chefs de ghetto sont durs, et font des affaires sur le dos de ceux qu’ils accueillent, mais à l’écran, ce sont encore des humains. La dureté, de surcroît, permet des pauses, qui donnent elles-mêmes la possibilité à Léonard et Hope de commencer à s’aimer. De se donner un peu de tendresse, avant une chute qui apparaît quasiment inévitable… Qui explique que l’amour ne soit pas au centre du film, remplacé qu’il est par le souffle humain, tantôt coupé, tantôt mugissant…

Hope, un film de Boris Lojkine avec Justin Wang, Endurance Newton, Dieudonné Bertrand Balo’o, Richmond N’diri Kouassi, Henri Didier Njikam. Drame français, 1h30.

Visuels: © Pyramide Distribution

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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