
Cannes 2022, ACID : Yamabuki, peinture sociale conduite avec talent et justesse
La peinture d’existences difficiles face à une réalité laissant peu de chances, dans une région minière du Japon : un film où le regard du cinéaste et l’inattendu qu’il ménage marquent.
Une région rurale et montagneuse du Japon. Dans l’entreprise minière du coin travaille Chang-su, qui n’a qu’un objectif : gagner plus. Il est un immigré venu de Corée du Sud pour rembourser ses dettes. Non loin de là vit aussi un policier, qui a une fille au lycée local qui se pique d’aller à des manifestations, réunissant relativement peu de monde. De façon un peu fatale, ils vont se croiser. Et ce sont surtout les difficultés sociales auxquelles ils sont confrontés qui vont alors entrer en résonance.
Réalisé par le japonais Juichiro Yamasaki, ce long-métrage nimbé d’un gris réaliste et en même temps un peu vaporeux – avec une photo signée par Kenta Tawara – accroche en premier lieu par ses plans, précis, saisissant les visages des protagonistes en présence et s’affairant à faire surgir l’humanité de ces derniers, tout autant que son inscription dans un contexte social très précis. Le montage, très maîtrisé et dirigé également par le réalisateur, offre au film une belle respiration, prenant le temps qu’il faut pour ménager à ces visages de magnifiques et expressifs surgissements sous la lumière de la caméra, où leurs traits et ce qui les anime saisissent l’œil du spectateur.
A d’autres moments, ce sont les paysages de la région où se passe le récit qui trônent, minéraux, monolithiques et assez imposants, soumettant les protagonistes à leur dure réalité. Au final, si les existences décrites par le long-métrage n’apparaissent pas totalement inédites, la délicatesse de l’œil du réalisateur et son talent suffisent pour créer un sentiment de proximité avec le contexte qu’il peint. Avec également des éléments surprenants qui viennent marquer l’esprit, tel ce générique de fin inattendu, porteur d’une symbolique à la fois ouverte et ici esthétique, et ce pas vainement. Comme un petit instant suspendu, dans lequel on a envie de se replonger pour voir.
Présenté au sein de la programmation de l’ACID pendant le Festival de Cannes 2022, Yamabuki sortira dans les salles de cinéma françaises distribué par Survivance.
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Visuel : © Survivance