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Reprise : 5 films noirs de l’âge d’or mexicain

Reprise : 5 films noirs de l’âge d’or mexicain

16 June 2023 | PAR Olivia Leboyer

Crépuscule

Après la reprise en salles, en 2022, d’un cycle de films du réalisateur mexicain Roberto Gavaldon, voici 5 autres films noirs mexicains : Crepusculo de Julio Bracho (1945), Salon Mexico d’Emilio Fernandez (1948), El Suavecito de Fernando Mendez (1951) et El medallon del crimen de Juan Bustillo Oro (1956). A découvrir, pour un été déjà brûlant.

Cinq films noirs mexicains, qui répètent inlassablement les thèmes de l’obsession : l’amour malade, l’envie, le basculement dans le crime, les affres du remords.

Dans Crepusculo, de Julio Bracho, le jeu sur la temporalité est parfaitement tenu. Pour l’homme que nous voyons, visage marmoréen, regard revenu de tout, il est déjà trop tard. Nous comprenons vite que ce chirurgien renommé, Alejandro Mangino (Arturo de Cordova) a causé la mort d’un patient, et que les circonstances sont troubles. Des allers et retours nous introduisent dans la psyché du docteur Mangino, qui savait bien qu’il ne devait absolument pas agir ainsi, mais…

Car l’amour a fait irruption dans sa vie, bousculant tout. Il lui a suffi de croiser le regard d’un modèle nu, dans un atelier de sculpture, pour que l’obsession s’empare de lui définitivement. L’échange de regards avait été explicite et Mangino croyait avoir le temps. Mais, de retour en ville, il apprend que la belle Maria a épousé son meilleur ami, Ricardo. Le jour où le mari a un grave accident, Alejandro sait qu’il peut le sauver… ou pas.

Comme médecin, il connaît exactement les gestes à exécuter. Comme homme, il sait exactement où appuyer pour tuer le mari. Très expressionniste, le jeu d’Arturo de Corduva nous rend sensibles les tourments de ce Mangino, agité par mille pensées et pulsions troubles. Un regard dans le vague, un monologue intérieur, et nous voici introduits dans les tréfonds de son âme perdue. Comme dans tout bon mélodrame, il y a deux femmes, la sulfureuse Maria, à laquelle il est enchaîné, et sa petite soeur, tout innocence et bonté, qui l’attendra le temps qu’il faut. Mais est-il temps encore ? La vie, l’air frais de l’adolescence sont impuissants à retenir celui qui est déjà envoûté. Car l’amour fou est associé à la pétrification, à la mort.

Entre le jour et la nuit, l’espace ténu du crépuscule concentre les passions funestes. Même fatalité dans Le Médaillon du crime, de Juan Bustillo Oro (1956), où un modeste employé se trouve pris dans l’engrenage d’un crime. Dans la grande ville impersonnelle, la vertu et le vice se trouvent tout d’un coup confondus, mêlés.

Ces films mexicains rayonnent d’un éclat noir. Au bord de l’abîme, les âmes regardent vers le bas et, saisies de vertige, plongent en conscience.

Crepusculo de Julio Bracho, Mexique, 1945, 1h48, avec Arturo de Cordova, Gloria Marin, Julio Villareal, musique Raul Lavista. Camelia films. Sortie le 14 juin 2023.

visuels : photo officielle du film.©

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Olivia Leboyer
Docteure en sciences-politiques, titulaire d’un DEA de littérature à la Sorbonne  et enseignante à sciences-po Paris, Olivia écrit principalement sur le cinéma et sur la gastronomie. Elle est l'auteure de "Élite et libéralisme", paru en 2012 chez CNRS éditions.

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