A l'affiche
Eva Ionesco et Galatéa Bellugi nous parlent du tournage d’”Une jeunesse dorée”

Eva Ionesco et Galatéa Bellugi nous parlent du tournage d’”Une jeunesse dorée”

12 January 2019 | PAR Yaël Hirsch

Après My Little Princess (2011) où elle racontait son enfance comme modèle de photos érotiques pour sa mère, la réalisatrice, comédienne et écrivaine Eva Ionesco ouvre le deuxième volet d’une trilogie biographique. Centré sur les années de jeunesse (17-18 ans) qui sont aussi des années d’excès autour de la fameuse boîte de nuit Le Palace, Une Jeunesse dorée est un film-fresque où Eva Ionesco retrouve Isabelle Huppert. Nous l’avons rencontrée avec l’autre actrice principale de son film, qui est aussi son double :  Galatéa Bellugi. Discussion festive, colorée et réflexive.

 

Avec Galatéa Bellugi et avant Anamaria Vartolomei, comment choisissez-vous une actrice pour vous incarner ?

Eva Ionesco : Je leur demande simplement de représenter une part de moi, il y une part de l’actrice. Le personnage de Rose est aussi beaucoup Galatéa, c’est une synergie qui s’est faite, moi je suis beaucoup plus comique dans la vie que Galatéa. Elle a beaucoup plus, si je puis me permettre, de profondeur. Ce qui est sûr c’est que je voulais qu’elle soit blonde. Parce que j’adore les héroïnes bondes et sophistiquées.

 

Il a aussi quelque chose de très volcanique dans le personnage de Rose …

Galatéa Bellugi : Il a fallu parler de la vie au Palace, comment on la vivait : de manière volcanique. Au palace, ils n’avaient pas peur de mourir, la mort c’était quelque chose qui allait arriver à tout le monde.

 

Parce que vous pensez que votre génération  a plus peur de mourir…

G: Je pense que nous nous préoccupons plus de notre futur alors qu’à l’époque c’était…

E : C’était au jour le jour !

G : Voilà, au jour le jour

E : je lui ai dit que c’était véritablement au jour le jour qu’on vivait et que c’était un peu d’amour et d’eau fraîche. Et j’ai aussi dit à Galatéa sur le personnage que c’était quelqu’un qui a un manque, une enfant de la Ddass et qu’elle pleure très fort et qu’elle a besoin à chaque fois qu’on la tienne, enfin d’être tenue dans les bras. Et aussi, que la première chose qu’elle fait, c’est de s’enfermer dans sa chambre pour lire, c’est d’apprendre à lire et d’aller vers le théâtre. Ce sont des gens qui lisent, contrairement à beaucoup de jeunes maintenant

G : Lire, c’est une façon s’évader de ces fêtes, et d’elle, d’elle-même, de repenser à cette histoire…

 

Le film est très riche aussi du souci du détail, des robes, des matières, des meubles… Quel est l’impact sur le tournage ?

G : Ça aide beaucoup les costumes, d’avoir un corset, c’est une façon de se tenir en fait, d’avoir des belles robes, d’avoir autant de maquillage…

E : En plus ça seyait à Galatéa, c’est une mode et une époque qui lui va très bien. Il y a surtout eu besoin de mettre des couches, pour mettre le corset, se maquiller pour entrer dans un personnage.

 

Galatéa, le Palace ça vous disait quelque chose avant le film, vous en aviez entendu parler ?

G : avant je connaissais pas du tout non mais avec toutes les belles histoires d’Eva je suis devenue presque un peu nostalgique. Comme si je connaissais un endroit mais que je ne pouvais pas y aller

 

Par rapport à My little Princess, l’héroïne a perdu l’aspect roumain de sa vie. Cela a une importance ?

E : La grand-mère meurt dans le premier film et Melvil ne pouvait pas ressusciter. Mais il reste un certain esprit roumain. Quand les personnages boivent et quand ils sont tous avec leurs fourrures, pour moi ils sont comme en Russie avec de la vodka. La nostalgie dans ce film a quelque chose de l’est.  Ce n’est pas un film franco-français on va dire, c’est un film d’exil parce que même à l’intérieur de l’histoire, un exil a lieu. Rose qui se balade avec sa valise, elle sort de la Ddass, après c’est Michel qui repart avec une valise, et puis enfin c’est elle à nouveau qui le quitte avec la valise. On est toujours un peu en exode, il y a toujours cette espèce d’idée qu’on va chez les riches et puis après où est ce qu’on va ? C’est ce moment là que j’ai voulu montrer, plus encore que de parler des années de festivité du Palace. C’est plutôt ce moment d’errance d’une jeune fille qui se sépare de son premier grand amour et qui se fait violence. Il y a quelque chose de très innocent et très pur, qu’elle voit s’altérer.

 

L’héroïne a aussi quelque chose d’une Pin Up, la nostalgie n’est pas circonscrite aux années 1970…

Oui il n’y a pas que la nostalgie du Palace. Le film a une tristesse nostalgique à la fin, quand le couple se sépare, quand Galatéa se sépare de Michel, et qu’elle reste toute seule, rôde une sorte de nostalgie, comme si les lieux avaient été désertés, que c’est vide, qu’il y a plus rien.

 

De quoi parle le troisième volet de la Trilogie commencée avec My Little Princess ?

E : La 3ème partie est très violente : il s’agit de mort et de sexe. C’est l’histoire d’une fille qui cherche son père qui s’est engagé dans les SS. Elle cherche des choses, elle n’en trouve pas et qui à un moment donné rencontre quelqu’un qui doit parler, qui va mourir. Donc voilà c’est une histoire de deuil, c’est une histoire de reconstitution sur le passé, c’est un puzzle possédé de violence. C’est pour cela que cette deuxième partie celle de la Jeunesse Dorée n’est pas plus violente. Je voulais pas être tout le temps dans la morale. C’est vrai, quand on pense aux années 1980, on pourrait se dire merde c’est quand même beaucoup de mort, beaucoup de sexe, beaucoup de violence, et moi sortant de My Little Princess je n’en voulais plus. Le personnage de Rose a quelque chose de gracieux, de fragile et je voulais garder cette fragilité, même si l’on s’imagine qu’à l’époque, on partage tout.

 

C’est impressionnant de tourner avec Isabelle Huppert ?

G : c’est une grande chance ! Pouvoir jouer avec des personnes qu’on admire… C’est une grande actrice ! De pouvoir voir comment elle travaille, discuter, demander des conseils… c’est une grande chance.

 

visuel : yh

Bienvenue en Corée du Nord une mise en scène d’Olivier Lopez au Belleville
De Tati à Godard: Musiques de film, musiques populaires, à l’Auditorium de Radio France
Avatar photo
Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration