A l'affiche
[Critique] « Homeland Irak année zéro » partie 1, Abbas Fahdel filme l’attente de la guerre

[Critique] « Homeland Irak année zéro » partie 1, Abbas Fahdel filme l’attente de la guerre

21 February 2016 | PAR Gilles Herail

Homeland Irak année zéro avait pour projet d’apporter un angle différent sur la (seconde) guerre en Irak. La partie 1 du documentaire acclamé par les critiques souffre cependant d’une durée excessive et d’une absence de point de vue politique. On salue l’ambition d’ Abbas Fahdel mais son témoignage familial ne nous trouble pas autant qu’espéré. Notre critique.

[rating=2]

Extrait du synopsis officiel : Une fresque puissante qui nous plonge pendant deux ans dans le quotidien de sa famille peu avant la chute de Saddam Hussein, puis au lendemain de l’invasion américaine de 2003. Ce documentaire est découpé en deux parties – l’avant et l’après.

La guerre en Irak de 2003 est un instant charnière du 21ème siècle dont on ne sait encore mesurer tout l’impact sur les relations géopolitiques contemporaines. Un évènement politico médiatique d’une ampleur inégalée qui a mobilisé les opinions publiques du monde entier. Un conflit qui a mis un pays à feu et à sang et provoqué le chaos que l’on connait aujourd’hui. Tout semblait avoir été dit, analysé et débattu sur l’échec de l’intervention militaire américaine et l’impossible transition démocratique qui l’a suivi. Abbas Fahdel a pourtant trouvé  un angle différent qui donne une grande légitimité à son projet. Le cinéaste a filmé l’avant et l’après, pour apporter son témoignage, forcément subjectif, sur le quotidien d’irakiens de la classe moyenne confrontés à la guerre. La partie 1 du documentaire (divisé en deux segments) s’attache à capter l’attente d’un conflit annoncé qui tarde à commencer, les préparatifs d’une invasion qui semble inéluctable. L’idée est fascinante, l’ambition plus que louable et les enjeux passionnants. Car Homeland Irak année zéro filme avec amour son pays d’origine et nous emmène dans un portait de famille intime et émouvant. La caméra suit les frères, les sœurs, les cousins, cousines, voisins, voisines. Différentes générations qui continuent à vivre vaille que vaille en préparant les jours noirs qui les attendent. Des tranches de vie qui veulent capter un sentiment, un état d’esprit et des fragments de ce qu’était l’Irak avant mars 2003.

Le film laisse entrevoir, par instants, des éléments qui permettent de mieux comprendre la société irakienne de l’époque. Le système politique tout entièrement voué au culte de la personnalité de Saddam, s’érigeant en petit père du monde arabe dans des clips de propagande ultra kitchs. Le ressenti très fort contre l’embargo et ses conséquences économiques désastreuses. L’habitude de la guerre et la résignation face aux drames à venir, au sein d’une population qui n’a jamais connu de paix durable. Abbas Fahdel parle aussi très bien de l’étrange sentiment d’ “attendre” la guerre. Une angoisse mêlée d’excitation dans les yeux d’enfants pour qui la guerre reste une notion floue. Notamment pour ce jeune garçon dont on apprend qu’il sera tué après l’intervention américaine, qui profite de l’occasion pour jouer au grand et s’impliquer dans les préparatifs pour mieux cacher sa propre peur. Abbas Fahdel reste malheureusement en surface de tous ces questionnements, comme captif d’une volonté de donner une représentation positive de joyeuse de son pays (pour mieux l’opposer au chaos de l’après). La caméra s’attarde sur les merveilles d’un patrimoine historique et naturel splendide. Et le film s’attache avant tout à nous immerger dans des coutumes, des traditions, des moments d’échange et de joie. Le montage coupe très peu, conservant l’entièreté de séquences conviviales qui s’accumulent (soirées en familles, mariage, repas, etc.). Et les 2h40 de cette première partie semblent exagérément longues, s’éloignant de l’objet politique attendu pour devenir un film de famille, à l’indiscutable sincérité, qui aurait cependant gagné à adopter un point de vue plus affirmé et une construction plus pensée.

Gilles Hérail

Homeland, Irak année zéro, un documentaire irakien de Abbas Fahdel, durée 2h40, sortie le 09/02/2016

Visuels : ©  affiche et bande-annonce officielles du film
Victoires de la Musique Classique 2016 : Marianne Crebassa
Gagnez 3×2 places pour le concert de Thylacine à La CLEF le 11 mars
Gilles Herail

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration