
« Ponctuation » de Jane Puylagarde, l’intemporelle syntaxe chromatique
« Avec la peinture, la couleur est magnifiée et prend tout son sens. La création qui en résulte existe en soi, elle ne s’inscrit pas dans une mode passagère. » Jane Puylagarde découvre cet art au Mexique durant les années 1990 et fut dès lors inspirée par la puissance des chromatismes et des cercles issus des oeuvres artisanales de ce pays. De retour en France, l’artiste se réapproprie les codes du monochrome dans une syntaxe personnelle et hypnotique où les couleurs nous parlent dans l’intimité d’une lumière et de ses interstices.
Issue de la mode, Jane Puylagarde arbore dans son regard de plasticienne la sensualité de la matière et insuffle à ses toiles une nature tridimentionnelle. Évoquant de prime abord la théorie du spatialisme de Lucio Fontana au sein de laquelle la construction picturale repose sur l’éventrement de la toile, les particules et la lumière à l’énergie incontrôlée, les monochromes de Jane Puylagarde sont pourtant le fruit d’une minutie presque obsessionnelle: « La composition de mes toiles s’organise selon une méthode rigoureuse dont le but est de générer un rythme. Chaque virgule et chaque point ont leur place. La virgule est la base, le point l’ornement. La virgule, soit accolée à la couleur du fond, soit d’une teinte plus soutenue, sert de support au point et va indiquer son mouvement. »
Si à l’instar des tableaux pointillistes et impressionnistes la contemplation joue avec la distance et la perception proche ou lointaine du regard, Jane Puylagarde malaxe davantage la profondeur grâce à un procédé inédit: des épingles à cheveux en guise de pinceau. L’acrylique qui s’accumule le long des barrettes cisèle l’épaisseur des volumes des gouttes déposées et l’artiste joue ainsi avec la taille des pointes pour tracer sa ponctuation. « Chaque point sert d’écrin à la couleur suivante qui vient s’y ajouter, pour la nuancer ou l’intensifier (…) Cela exige une grande subtilité dans l’intégration des nuances, le but étant de faire vivre le monochrome sans le rompre. Les nuances doivent aussi onduler en accord avec la densité de la matière. Ma technique de points virgules prend tout son sens dans ces harmonies autour d’une couleur. »
La matière se transforme alors au détour des pigments lumineux et de leurs ombres, se faisant organique, minérale, comme une invitation à la sensualité scintillante de Klimt dans des terres volcaniques ou des eaux d’azur lointaines gorgées de nazars.
Photo : (c) Franck Brouillet
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