
Isabelle Plat à la galerie Eric Mouchet: nos identités ont la silhouette d’empreintes chevelues
Jusqu’au 16 janvier 2016, Isabelle Plat expose des sculptures et des dessins à la galerie Eric Mouchet à Paris, des œuvres conçues avec des cheveux. En choisissant ces morceaux précieux de notre patrimoine génétique, éparpillés par le temps ou les ciseaux, Isabelle Plat nous interroge sur la notion d’identité et sur l’écologie tout en réfléchissant au statut d’une œuvre d’art dans notre société.

©Rebecca Fanuele
C’est une exposition hors norme et qui pourtant fait écho à des problématiques quotidiennes. Jusqu’au 16 janvier 2016, Isabelle Plat propose à la galerie Eric Mouchet A un cheveu de l’usage, des oeuvres réalisées avec des cheveux, récupérés chez des coiffeurs.
Qu’il s’agisse d’un dessin ou d’une sculpture, les cheveux prennent davantage au sérieux leur rôle de protagoniste d’un capital génétique qui remet à chaque identité les insignes de la différence.

70 X 33 X 25 cm
Cheveux de Bruxellois feutrés
2005
Par un travail habile, minutieux et original, Isabelle Plat élève le cheveu au rang de meilleur confident de notre intériorité. Les cervelles, les bouches ou les pieds sont les parties séparées d’un corps qui pourrait appartenir à tout le monde mais elles sont constituées elles-mêmes d’un matériau doté lui aussi d’une origine et d’une histoire. Aussi, bien que la seule trace concrète de ce vécu soit un prénom dans le titre de l’œuvre, nous participons au processus artistique d’où la question posée dans une des pièces présentées, Elles, sans elles, sont-elles là ?

67 X 79 X 6cm
Technique mixte
2015
Mais les cheveux ne semblent pas assumer totalement leur héritage. Ils se cachent dans la forme d’un soutien-gorge, d’un bracelet, d’une botte, de tongs ou de chaussettes comme un refus de se frotter aux peaux qui se glisseront dans ces vêtements devenus des carapaces de tissu. Les cheveux esquissent également la forme d’un pied gigantesque mais ils semblent s’effacer en une empreinte vaporeuse et discrète telle une preuve de vie laissée sur une grotte préhistorique.
Ces rapports complexes qu’entretiennent les cheveux avec l’identité nous renvoient finalement à nos propres difficultés, celles d’arriver à un dialogue apaisé avec nous-mêmes.

4,30 X 1,50 m
Dessin aux cheveux de Charolais sur soie
2008-2013
Chez Isabelle Plat le cheveu est également un élément central du défi écologique. Etre vivant, il est recyclé par l’artiste et puisque le cheveu est la clé du coffre-fort génétique donc de l’humain, Isabelle Plat nous rappelle l’importance de la préservation de notre milieu et de notre environnement dans lequel la prise de conscience collective n’empêche pas l’affirmation de soi.

Cheveux de charolais sur toile
100 X 50 cm
2011
D’un point de vue purement artistique, A un Cheveu de l’usage est également une exposition fondamentale car Isabelle Plat médite sur la place dévolue à une œuvre d’art dans la société d’aujourd’hui. Ainsi elle développe depuis plusieurs années la sculpture d’usage, un objet du quotidien et utilitaire installé dans le milieu artistique sans lui être hostile, bien au contraire. L’œuvre créée peut en effet s’adapter aux grandes toiles, prendre ses aises sur des tables, se poser par terre ou se coller à des murs.

©Rebecca Fanuele
En définitive, les cheveux, qui voient passer tant de choses au-dessus de leurs têtes et cachent dans leurs tiroirs des pensées et des rêves, ont de nombreuses subtilités qu’Isabelle Plat sait orchestrer.
Christophe Dard.
INFORMATIONS PRATIQUES :
Isabelle Plat A un cheveu de l’usage
Jusqu’au 16 janvier 2016
Galerie Eric Mouchet
45, rue Jacob 75006 Paris
Du mardi au samedi de 11h à 13h et de 14h à 19h
[email protected]
ericmouchet.com