La griffe Lanvin entre espoir et désarroi
La bataille est terminée. Entre le conglomérat chinois Fosun, propriétaire du Club Med et le géant Qatari Mayhoola qui a notamment la main sur Balmain et Valentino, l’heure n’est plus à la rivalité. En effet, la maison Lanvin a rejoint jeudi 22 février, le giron du groupe chinois, annonçant une nouvelle ère pour la plus ancienne des maisons de couture françaises …
Une page se tourne et une nouvelle ère commence. La maison Lanvin, forte de ses 129 ans passés dans le paysage de la couture française, a retrouvé un nouveau propriétaire. Fosun, un conglomérat chinois connu pour avoir remis sur les rails les fameux villages de vacances Club Med, reprend le contrôle de la griffe. Jusque-là, la taïwanaise Shaw Lan Shu-Wang possédait 75% des parts de la marque, sérieusement en difficulté depuis le départ de son créateur star Alber Elbaz.
Les années Elbaz puis la chute
Depuis fin 2015, date à laquelle le créateur israélo-américain a fait ses adieux, la maison peine à retrouver la voie du profit mais surtout, une identité créative susceptible de faire battre à nouveau le cœur de la mode. Durant quatorze ans, Alber Elbaz avait réussi à ranimer cette marque tombée en désuétude, lui insufflant magie, audace, et féminité, à travers des silhouettes aux drapées maitrisées, opulentes mais jamais disgracieuses et aux accessoires toujours surprenant. Mais la discorde entre la femme d’affaires taiwanaise et « Monsieur Elbaz » a hâté d’achever le règne du plus fantaisiste des créateurs de sa génération. Lanvin, orpheline, avait fini par perdre de son aura et nombreuses sont les clientes conquises au fil des collections à s’être détournées peu à peu de la maison. Lentement mais sûrement, cet épisode a fait basculé Lanvin dans une spirale descendante au point que les responsables de la griffe ont refusé de publier leurs résultats en 2017, après avoir enregistrer une perte nette de 18,6 millions d’euros en 2016. Bouchra Jarrar, valeur montante de la couture parisienne, avait ensuite obtenu le poste de directrice artistique, imposant les codes qui avaient été la clé de son succès : des lignes droites et épurées, une palette de couleur neutres et une sobriété assumée. Mais la greffe n’ayant pas pris, au bout de deux collections la créatrice française a été remerciée.
Un futur incertain
Aujourd’hui, le directeur artistique de Lanvin se nomme Olivier Lapidus, fils de Ted, designer phare des années 70 ; il a présenté sa première collection en septembre dernier. Celui qui a déclaré vouloir faire de la maison Lanvin le « Michael Kors à la française » s’est logiquement heurté aux critiques acerbes concernant sa collection, plus proche de la pauvreté créative que d’un minimalisme recherché. Aujourd’hui, 100 millions d’euros seraient mis sur la table par Fosun afin de permettre à la griffe de retrouver un second souffle. Mais l’enjeu, au-delà d’être financier, questionne l’avenir d’une maison emblème de la couture et de l’excellence française. Face à un propriétaire chinois qui ne connait rien du monde de la mode et un directeur artistique à la vision cruellement dépourvue d’audace, seuls les 250 employés de Lanvin demeurent les gardiens de l’héritage de cette maison iconique.