
Blanche-Neige et le consentement : la cancel culture revisite-t-elle le conte ?
Le parc Disneyland en Californie a déclenché une polémique lors de sa réouverture. La scène du « baiser d’amour » entre le prince et Blanche-Neige n’a pas plu aux deux chroniqueuses du SF Gate qui y voient là la mise en avant « d’idées rétrogrades ».
Cette semaine, le nouveau manège Blanche-Neige au parc Disneyland d’Anaheim a beaucoup fait parler. Il s’agit d’une attraction où le visiteur revoit le conte des Frères Grimm adaptés par Disney. Le circuit se termine par la scène du baiser d’adieu que le prince donne à une Blanche-Neige allongée dans son cercueil de verre. Tout le monde connait la suite de l’histoire : grâce à ce baiser, le sort est rompu et l’héroïne commence alors à filer le parfait amour avec son prince charmant.
Mais, c’était sans compter Julie Tremaine et Katie Dowd, deux chroniqueuses du SF Gate, qui ne voient pas l’histoire de la même manière. Pour elles, « Un baiser que [le prince] lui donne sans son consentement, alors qu’elle est endormie, ne peut pas être considéré comme le véritable amour si seule une personne sait ce qu’il se passe ». Ainsi, elles pensent que Disney ne devrait pas mettre en avant une scène aux « idées rétrogrades» à la fin de son attraction car cela pourrait donner un mauvais exemple aux enfants.
Les réactions ne se sont pas faites attendre. Aux quatre coins du monde, les médias ont ajouté Blanche-Neige à la liste des œuvres critiquées par la « cancel culture ». Rappelons que le film Autant en emporte le vent ou encore Les Aristochats a déjà été point du doigt à cause des clichés racistes qu’il véhiculait. Aujourd’hui, pour certains, cet article tente de censurer le dessin animé Blanche-Neige.
#BlancheNeige … Est-ce que là, ça passera mieux ? pic.twitter.com/AO2K0jd1Gd
— Barbara78 (@dragonduclos) May 5, 2021
Mais est-ce vraiment une manifestation de la « cancel culture » ?
Selon Philosophie Magazine, la « cancel culture », ou culture du bannissement, est une « dénonciation publique, souvent accompagnée d’une volonté de boycott, d’une personnalité ou d’une institution. Les raisons sont multiples : racisme, sexisme, viol, pédophilie, meurtre… Pour certains, elle consiste à rendre justice aux personnes lésées en retirant de l’espace public la parole ou les créations des personnalités visées. Pour d’autres, elle est une grave atteinte à la liberté d’expression et de création. »
Si ce phénomène conduit souvent à des campagnes de harcèlement sur les réseaux sociaux, dans le cas de Blanche-Neige, rien de tel n’est arrivé. À l’inverse, ce sont plutôt les quelques lignes à la fin d’un article qui ont conduit à de vives réactions sur Internet. Il semble alors y avoir beaucoup de bruit pour rien.
Les détracteurs de la « cancel culture » ont souvent des réactions épidermiques. Dès qu’une œuvre est critiquée sur le plan moral, ils y voient là l’expression d’une censure et souhaitent la combattre. Or, l’ironie de l’histoire est qu’ils appellent souvent ceux considérés comme « censeurs » à être censurés.
Aujourd’hui, chaque camp se fait face, se caricature et semble parfois loin d’être prêt à débattre à la même table sur le plan des idées.
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