
Cannes 2023, Semaine de la Critique : Lost Country, portrait engagé d’un jeune serbe dans la nuit
Plus que par son scénario, ce long-métrage séduit par son atmosphère, qui enveloppe irrémédiablement son héros.
Stefan est un tout jeune adolescent serbe, qui vit les élections de 1996. Autour de lui, certains courent s’engager contre le Parti socialiste de Serbie, qui n’a pas gagné mais veut à tout prix le faire croire. Avec un chef qui n’est autre que Slobodan Milosevic, chantre d’un nationalisme meurtrier. Stefan a cependant un problème : il a une mère qu’il adore, mais qui travaille également pour le Parti socialiste de Serbie, comme porte-parole.
Lost Country est un film dans lequel le scénario place le jeune héros dans différentes situations où il lui est suggéré qu’il doit choisir son camp. Mais cet axe-là n’est pas le plus intéressant. Un sentiment de déjà-vu flotte parfois autour de certaines des situations peintes. D’autre part, le rapport entre Stefan et sa mère peut ne pas parvenir au spectateur comme l’élément le plus profond du film, non plus. Lui l’observe dans ses réactions aux coups de fil de son parti, l’écoute lui dire à quel point elle l’aime et fait tout pour lui… L’actrice Jasna Duricic reste remarquable de sensibilité. Mais cette relation filiale semblait pouvoir être creusée et détaillée davantage.
Non : au final en fait, le jeune Stefan paraît se livrer à un face-à-face avec son pays, et l’atmosphère qui l’envahit en ce temps. C’est lorsqu’il arpente ses rues en essayant d’y trouver sa place que le film paraît vraiment se déployer. Une impression qui vaut pour les scènes de nuit comme pour celles de jour d’ailleurs. C’est que ce paysage enveloppé d’une aura menaçante, assez discrète malgré les bruits de l’extérieur, vient se heurter au visage du jeune acteur Jovan Ginic, fermé et essayant de ne pas laisser sortir ses émotions profondes. L’un comme l’autre apparaissent à l’image porteurs de rage, et coulés dans une sombre colère. On suit donc ce film signé Vladimir Perisic en guettant l’instant où les choses pourraient se rompre, du côté du jeune héros comme de son pays déjà perdu. Un fil bien tendu, au final.
Lost Country sortira dans les salles de cinéma françaises distribué par Rezo Films.
La Semaine de la Critique de 2023 se déroule encore jusqu’au 25 mai, pendant le temps du Festival de Cannes.
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Visuel : © EASY RIDERS FILMS