
Berthe Morisot, femme impressionniste au Musée Marmottan Monet
En 1896, pour célébrer le premier anniversaire de la mort subite de Berthe Morisot, ses amis- Degas, Monet, Renoir et Mallarmé organisent une exposition posthume chez Durand-Ruel, rue Lafitte à Paris, du 5 au 21 mars. Femme, mère, épouse et peintre dans un monde d’hommes qui la respectaient, elle faisait figure d’ovni dans la France du second XIXe siècle. Le si joli musée Marmottan-Monet lui consacre une formidable rétrospective.
Voilà plus d’un demi-siècle que les musées boudent Berthe Morisot. En 1941, dans le catalogue relatif à l’exposition qui lui est alors consacrée, Paul Valery, époux de son adorée nièce Jeanne écrit “On perçoit à présent des qualités qu’elle fut seule à posséder parmi les impressionnistes, et qui sont, du reste, des plus rares en peinture. Il est difficile d’isoler et de définir ces subtiles qualités : on peut être grand peintre sans elles.”
Atypique, Berthe Morisot l’est par sa vie même. Elle se marie tard, à 33 ans avec le frère de Manet, donne naissance à sa fille Julie à 37 et meurt comme un éclair à 54 ans. Sans jamais sacrifier sa famille, elle transcende le genre en les rendant modèles. Sans atelier, elle peint à l’aquarelle ses compositions extérieures et les peaufine à l’intérieur à l’huile. Sa minutie et son implication rendent la peinture légère, faussement hâtive, bien que les sujets soient emplis d’une éternelle mélancolie. Les visages s’effacent au profit de la forme, on croit avoir devant nous une puriste impressionniste (Bergère nue couchée) et c’est là que le dessin surgit (Le piano). Berthe Morisot était résolument avant-gardiste, son travail préfigure l’œuvre de Monet (Meule de foin) tout en affirmant une recherche rare, celle de la forme et en même temps celle de la dissolution de la forme. Insoluble ?
Absolument pas. Le lumineux Les lilas à Maurecourt qui met en scène sa sœur adorée Edma et ses filles met dans le quotidien de la tension, celle d’une femme abandonnée à son statut de mère qui a elle, malgré son talent, délaisser la peinture. Le noir de sa sœur est relevé par des touches jaunes venant des pâquerettes égayant le jardin.
Complexe, sa peinture l’est de façon évidente. L’exposition biographique “Berthe Morisot”, en commençant sur un autoportrait la représentant en peintre, met l’accent sur son métier et non pas sur son statut de muse. Un superbe Manet la montre étendue et parait-il, ressemblante. La commissaire de l’exposition, Marianne Mathieu la définit comme étant “l’artiste la moins dogmatique et la plus ouverte d’esprit de sa génération”. La force de sa vie est d’avoir été acceptée dans une égalité totale au milieu des hommes. Elle sera présente au Salon de 1876, et continuera jusqu’à son dernier tableau, La Petite Marcelle en 1895, à étonner par son mélange des influences lui donnant une patte tout à fait personnelle. Étonnamment, elle privilégie les modèles féminins et enfantins, au départ, qu’elle pioche dans ses proches puis, les enfants ayant grandi, auprès de modèles professionnels. Obsédée il semble par la jeunesse éternelle, elle part en laissant cette dernière œuvre, dans les mots de sa fille “cette petite fille dont la figure aux grands yeux noirs et tristes est entourée de cheveux”. La tristesse semble être le fil conducteur de son travail, offrant profondeur et intensité à la palette impressionniste qu’elle teinte de sombres verts puissants.
Visuels :
Berthe Morisot, La Lecture ou L Ombrelle verte, v.1873 (c)The Cleveland Museum of Art_Gift of the Hanna Fund. 1950
Berthe Morisot, Bergère nue couchée, 1891 (c)Carmen Thyssen-Bornemisza, on loan at the Thyssen-Bornemisza Museum
Berthe Morisot, Julie rêveuse, 1894 (c)Dreyfus
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4 thoughts on “Berthe Morisot, femme impressionniste au Musée Marmottan Monet”
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eliane hustinx
Jeme réjouis vraiment d’aller l’admirer car elle est admirable !!!!!!! je viendrai de Liège (Belgique) à bientôt……