Théâtre
Le Songe : Gwenaël Morin s’empare des fondations d’Avignon

Le Songe : Gwenaël Morin s’empare des fondations d’Avignon

13 July 2023 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Déclamer du texte aussi fort que possible pour pouvoir écraser le son des cigales, c’est la mission que relève tous les soirs, jusqu’au 24 juillet, Gwenaël Morin et sa troupe dans le jardin suspendu de la Rue de Mons. À voir et à entendre absolument. 

 

  • Arrêtez de me suivre?! (Démétrius)

  • C’est vous qui m’attirez (Héléna) 

 

Ce songe s’appelle in extenso « Démonter les remparts pour finir le pont ». Au cas où vous l’auriez oublié, LE pont d’Avignon, sur lequel on y danse tous en rond, est tout cassé. Il lui manque plusieurs bras. Il ne va pas au bout, de l’autre côté. C’est un pont en suspension. Le festival a demandé à Gwenaël Morin de répondre justement à ce problème : comment finir le pont ? Faut-il démonter les remparts ? L’allégorie est délicieuse. Avignon est associé soit au pont, soit au festival. Il était temps de les fusionner ! Pour ce faire, nous sommes réunis, un soir d’été, dans le superbe jardin de la rue de Mons, suspendu tout près du palais.  Le lieu est idéal pour y déclamer fort du Shakespeare. Le théâtre de Gwenaël Morin est viscéral et pauvre. On fait décor de tout, costume de rien. Il y a toujours chez lui un souci de clarté envers les spectateurs et les spectatrices. Ils et elles doivent comprendre, c’est une urgence. 

Plan à quatre

L’histoire du Songe a des allures de vaudeville : Hermia veut épouser Lysandre, mais son père, Égée, la destine à Démétrius, dont est amoureuse Héléna. Lysandre et Hermia s’enfuient dans la forêt, poursuivis par Démétrius, lui-même poursuivi par Héléna. Ce texte fou, mille fois adapté, regorge d’idées qui sont plus délicieuses les unes que les autres. Shakespeare impose des mises en abyme successives. Le théâtre est dans le théâtre. En le mettant en scène dans ce jardin, en le déclamant avec le ventre, Gwenaël Morin en donne une lecture incarnée et urgente. La troupe, car il est question de troupe plus que d’individus, est monstrueusement chevillée aux mots. Virginie Colemyn, Julian Eggerickx, Jules Guittier, Barbara Jung, Grégoire Monsaingeon, Nicolas Prosper s’éclatent avec les personnages inventés par le maître anglais. Nous avions oublié que le grand Will avait même mis « un mur » dans la distribution ! Et, ce qui est sûr, c’est que Gwenaël Morin, dans ce jardin sublimé par la lumière de Philippe Gladieux, où des soleils sont énormes et où les arbres sont psychédéliques, fait exploser le quatrième mur !

Jusqu’au 24 juillet à 21h30. Durée : 1h45. 

 

Visuel : Le Songe, Gwenaël Morin, 2023 © Christophe Raynaud de Lage

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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