
La prophétie des Lilas de Thibaud Croisy au festival SPOT
Dédié aux équipes et aux formes nouvelles, le festival SPOT qui nous avait fait découvrir l’année dernière le stupéfiant VIVIPARES, est de retour cette fois en automne pour sa quatrième édition. A coté d’une version plus aboutie et toujours géniale de La Gentillesse de Christelle Harbonn, le festival fut l’occasion de découvrir La prophétie des lilas de Thibaud Croisy.
Au début de l’année 2016, Thibaud Croisy retrouve la personne qui l’a mis au monde. Cette rencontre origine sa pièce née de conversations avec ce médecin qui l’a connu alors qu’il avait la taille d’un poing fermé. L’obstétricien est passionné par la question du corps lorsque celui ci est traversé par la loi mais aussi lorsqu’il est gendarmé, interdit et emprisonné par cette même loi qui sous le prétexte du respect de la dignité humaine empêche l’individu de disposer de son propre corps. A ce médecin Thibaud Croissy a le sentiment de devoir quelque chose. Est-ce ce corps et ce qu’il contient de promesse de maladie et de fin? Est-ce ce son origine et par extension sa légitimité au monde ?
Le dispositif scénique est simple. Thibaud Croisy s’assoit à son bureau face au public, il se substitue à nous et sans oublier d’un regard de vérifier notre attention, notre consentement à une complicité avec lui, il va lire son propre roman autobiographique, à notre place. Au bout de son bureau une opératrice manipule un video-projecteur et égraine le long du récit les images mentales associées.
La pièce courte confirme le retour du primat de la narration et cette narration par un circuit spontané devient philosophique et politique; de surcroît en émergent les questions et énigmes cardinales à toute existence qui sont entre autres l’origine, la mort, le corps et la pensée, la maladie, le consentement et la liberté. La pièce faussement innocente est une merveilleuse surprise et la narration devient discours; par un engagement de l’auteur elle devient un objet que l’on peut qualifier d’insurrectionnel, au sens où il frappe sans état d’âme sur quelques certitudes autant fédératrices qu’aliénantes.
Une belle pièce-aphorisme calibrée comme une nouvelle, très intéressante.
Conception Thibaud Croisy / collaboration artistique Élise Simonet / scénographie Sallahdyn Khatir / lumières et images Emmanuel Valette / interprétation Sophie Demeyer et Thibaud Croisy
production : Association TC / Aide à l’écriture : Le Phare, Centre chorégraphique national du Havre Normandie – Direction Emmanuelle Vo-Dinh / soutien : Centre national de la danse (résidence augmentée) et la Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France–Ministère de la Culture et de la Communication / production-diffusion : Claire Nollez
visuel Thibaud Croisy