Théâtre
Festival Impatience : Yuval Rozman dévoile “The Jewish Hour”

Festival Impatience : Yuval Rozman dévoile “The Jewish Hour”

29 January 2021 | PAR Elie Petit

En ce mois de janvier 2021, sous la menace de couvre-feux toujours plus tôtifs, un privilège unique est offert par le festival Impatience aux professionnels du monde du théâtre : assister à des représentations. En ce samedi, c’est The Jewish Hour qui joue au 104. Une pièce drôle, sérieuse et sévère à la fois.

The Jewish Hour est littéralement une création de plateau… de radio. On y découvre un frère et une soeur, qui montent leur première émission, lui à la régie, elle devant le micro. Depuis la ville de Natanya en Israël, elle s’adresse au public des francophones du pays.

TJH 98,6 occupe le créneau juste avant l’entrée de shabbat, le vendredi en fin d’après-midi. Le public entre sur le plateau accueilli par le duo, entre chansons festives traditionnelles juives et modernes israéliennes. Les gradins se remplissent avec la distance supplémentaires et les masques de rigueur. Immédiatement, on retrouve toute l’ambiance d’une radio avec les accessoires, les fiches, les moments, la présentation et la tranche musicale. Et un petit drapeau. La présentatrice, Stéphanie Aflalo (jouée par Stéphanie Aflalo) chausse son casque, tend son micro. La voix est posée. Il y a même un podcast, un site aussi.

Elle excelle dans ses chroniques, drôles et décalées. Le personnage est émouvant tant il veut bien faire, professionnellement, dans un cadre complexe. Ses invités ne l’y aident pas vraiment. Dans la portion biblique (on étudie une histoire par semaine), c’est au tour de l’épisode de Cain et Abel, le meurtre du frère. Un rabbin chanteur (Gaël Sall, qui incarne de nombreux rôles, dans une performance exceptionnelle) fait des siennes. Puis c’est l’interview d’un athlète ukrainien, Artium Golgoofiat (inspiré du vrai sportif Artem Dolgopyat, joué par Gaël Sall) qui expose devant nos yeux un dialogue difficile entre deux immigrés, elle et lui, venant d’horizons différents, ne parlant pas encore bien la langue du pays. Enfin, et pour un long moment, l’émission accueille un “invité exceptionnel”, Bernard-Henri Lévy, venu présenter son nouveau livre, l’Esprit du Judaïsme. Et c’est une des questions en jeu ici, que fait Israël de l’Esprit du Judaïsme ? La discussion, entre flatteries et saillies vexatoires rend le BHL fou, Fuyant puis frappant, vengeur puis réconfort, c’est un numéro complet d’humeurs qui se déploie devant nous (encore Gaël Sall, fantastique). Dans le discours, des positions de juifs de diaspora (ou tout fraîchement israéliens) s’affrontent, comme des arguments coupés, à la fois éculés et actuels.

Derrière le dispositif accueillant, devant les moments drôles voire hilarants, ce sont diverses thématiques propres à la situation des juifs et d’Israël qui nous prennent. Qui est le frère qui combat ? Que font-ils désormais de leur présence sur la terre vers laquelle ils pensaient toujours devoir venir ? Que fait ce pays à ses habitants? La pièce oscille entre le drôle, l’irrévérencieux, parfois le régressif, dans des modes de jeux très divers, statiques, mobiles, chantés.

La fin, toutefois, grandiloquente, nous a laissé perplexe. Le ton plaqué sur l’écran, hargneux sans y préparer, d’une parole rude qui dénote, par son vocabulaire et sa colère semble être celle du ressenti du metteur en scène face à son propre pays. La pièce, avant, l’émission, en disait peut-être plus et mieux sur ce que tous les autres en disent, en font, de ce pays.

The Jewish Hour de Yuval Rozman, avec Stéphanie Aflalo, Gaël Sall, Romain Crivellari

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