“A Leaf”, Célia Gondol et Nina Santes inventent le concert chorégraphique au Festival d’Avignon
Aux Hivernales, Centre de développement chorégraphique national, dans le cadre du Festival d’Avignon, Célia Gondol et Nina Santes s’interrogent avec une belle dose de folie sur la fragilité de nos espèces. Écolo et vraiment participatif !
Les deux danseuses se connaissent bien, elles partageaient lors de June Events 2018 une soirée où la recherche des sensations passait par la kinesthésie et le lâcher-prise. Pour A Leaf, elles nous cueillent dès l’escalier des Hivernales où la température est tropicale. On le sait, la salle des Hivernales porte très bien son nom, on s’y gèle ! L’allégorie du réchauffement climatique n’est pas à chercher très loin…
Sur scène, quelques branches illustrent une idée de cercle et au fond, des pans de peinture donnent pour le moment une impression japonisante. Elles sont habillées sport, legging et haut gris pour Nina, cycliste et tee-shirt coloré pour Célia. Elles vocalisent. Elles sortent des sons de leur corps qu’elles portent par des bras engagés en offrande. Très vite elles annoncent la couleur : “We are going to die”. La phrase, samplée, scandée devient un hymne.
L’axe du spectacle est posé. Dans un tempo qui évolue, dans une jungle de voix, les vibrations agissent sur le corps. L’accumulation des mots devient une bande son qui peut se danser, dans un geste plutôt techno, hanches fixes et buste mobile. Les temps sont marqués pour marteler chaque parole. Les interprètes débordent du plateau et font société avec le public. La communion est totale dans cette ode à la voix totalement performative. Souvent on est surpris, étonné, souvent on rit. A Leaf est un manifeste sans dogme, qui questionne l’éphémère. Chaque “tableau” si on peut le nommer ainsi, est totalement délirant et l’écriture vraiment surprenante.
La pièce se vit comme une prière à la planète. Les filles vont chercher jusque dans les entrailles la possibilité d’un miracle. Le fait d’utiliser (grande tendance chez les chorégraphes contemporains) la voix comme un muscle capable de danser, rappelle ce qui relie les humains entre eux, et permet de revenir aux racines pour tenter une reconstruction.
Un voyage intérieur très collaboratif qui rappelle dans son idée les rituels d’Anna Halprin qui dansait son cancer. Peut-on considérer l’éphémère ? Le duo très complice relève le défi.
Du 6 au 8 à 15h et 18h du 6 au 7, le 8 à 11h.
Aux Hivernales – CDCN d’Avignon.
Durée : 50mn
Visuel : A leaf © Annie Leuridan