
Les fables de Katia Kameli et Clara Chabalier à la MC93
Dans le cadre de New Settings, la MC93 accueille Stream of Stories – on nous l’a dit et on l’a cru. Un doux spectacle jeune public qui donne à réfléchir sur la façon dont se transmettent les histoires.
Clara Chabalier raconte : “Le premier manuscrit est celui d’un brahmane indien, Pilpay, au IIIe siècle avant J.-C., qui décide d’aller dire ses quatre vérités au roi, un tyran, et qui se fait mettre en prison. Mais le roi réfléchit, le rappelle et lui demande de lui écrire un livre. Se souvenant d’avoir parlé trop directement la première fois, Pilpay décide alors de remplacer les hommes par des animaux : c’est ainsi que naissent les premières fables.”
Révélation, les Fables de La Fontaine ne sont pas nées en Europe. Pourtant, c’est cela que nous pensions connaître et savoir, par cœur même, depuis l’enfance. Eux ne sont plus vraiment des enfants, le groupe d’adolescents apparaît à l’écran, ils s’apprêtent à piqueniquer sur l’herbe au pied d’un bloc d’immeubles roses. Nous sommes à Bobigny, ville cité à l’architecture très particulière. À quelques mètres de la MC93 d’ailleurs se trouve cette mairie super sixties aux fenêtres comme des legos. Dans ce décor urbain et théâtral, les adolescents vont devenir les héros des fables indiennes, perses puis européennes. Kalishan Easan, Livan Essoumba, Safir Fellah, Brittany Gatibelza, Louise Gontier, Lucie Guillemoles, Elsa Heartsburger, Gerald Labady, Tailiss Nivault, Kais Ouvrard et Nina Sodiant les jouent dans la syntaxe de leur écriture mais avec leurs vêtements, leur gestuelle et leur articulation d’aujourd’hui. L’effet pour les spectateurs collégiens est immédiat : ces histoires où les hommes politiques sont des loups sont éternelles et donc très actuelles.
Clara Chabalier est seule en scène malgré la présence forte du film. Elle va raconter, sur le ton de l’histoire du soir qu’on lit aux enfants, ce récit dont les principaux personnages sont justement les histoires.
Elle est seule sur scène malgré la musique d’Aurélie Sfez, qui offre à son récit une bande-son onirique et électronique. Elle est seule malgré les tapis auxquels elle donne vie comme s’ils étaient des origamis. Et à l’image de ce coffre qui se révèle être un monde, la pièce s’ouvre de plus en plus, le conte se fait intense, voyage autour du monde et des époques.
La morale de cette histoire, car il y en a une dans toute fable, est de ne pas croire tout ce qu’on nous raconte. Une autre morale est de dire fort qu’au lieu d’hurler à l’appropriation culturelle, il faut parfois y regarder de plus près pour y voir d’autres circulations, en rangeant son orgueil au placard !
Jusqu’au 10 avril à la MC93 – Le 9 à 18 h 30 et le 10 à 16 h 30.
Visuel : ©Marikel Lahana