Pierre Lacotte n’est plus
Le danseur-chorégraphe français Pierre Lacotte est mort hier, 10 avril 2023 à La-Seyne-sur-Mer, à l’âge de 91 ans. Il laisse une veuve inconsolable, la danseuse Ghislaine Thesmar qu’il épousa en 1968, mais également la meilleure image qui soit dans un milieu prompt à dénigrer, pour qui la critique est aisée et qui le regrette déjà, au-delà des frontières hexagonales. Ainsi qu’une œuvre personnelle (Marco Spada, Paquita, La fille du Pharaon, La fille du Danube, Le Rouge et le noir, etc.) et la reconstitution de quantité d’autres, du ballet blanc aux grands classiques.
Art chorégraphique
Danseur lifarien, il est l’un des instigateurs du passage de Noureev dans le “monde libre”, présent au Bourget lors de la désertion définitive de celui-ci du Kirov. Son œuvre majeure est sa version chorégraphique de La Sylphide, on ne peut plus fidèle à l’original de Pierre Taglioni qu’immortalisa en 1832 sa fille, Marie Taglioni. Pour Théophile Gautier, l’auteur du livret de Giselle, “Ce ballet commença pour la chorégraphie une ère nouvelle, et ce fut par lui que le romantisme s’introduisit dans le domaine de Terpsichore”.
Dans le rôle-titre de ce ballet recréé 140 ans plus tard pour marquer le passage à la nouvelle année en 1972, Pierre Lacotte engagea, comme il se devait, Ghislaine Thesmar. À ses côtés figurait un partenaire de légende, le magnifique Michaël Denard, qui venait d’être promu danseur étoile et qui tint le rôle de James, portant chic le kilt. Denard qui est décédé en février dernier. Grâce au réalisateur attitré de l’ORTF Yves-André Hubert, La Sylphide devint aussi une splendide cinédanse, qui plus est, tournée avec de grands moyens, en 35 mm, le premier ballet qui fut diffusé par la télévision couleur française.
Sténochorégraphie
Le travail archéologique de Lacotte est tel qu’il nous restitue comme personne non seulement le style de la danse romantique, mais, par la même occasion, les partitions, les costumes, les coiffures, les couleurs et les effets spéciaux dont le théâtre faisait usage au XIXe siècle. Son savoir-faire et celui de son épouse sont vite repérés et recherchés par les interprètes confirmés du ballet ainsi que ceux des nouvelles générations.
Il convient de souligner que le maître Pierre Lacotte a contribué à former les Jeunesses musicales, après avoir démissionné de la maison mère. Cette activité est sans doute facilitée par sa connaissance de la sténochorégraphie, ou “art d’écrire promptement la danse”, système de notation mis au point par Arthur Saint-Léon et publié par lui à compte d’auteur en 1852. Le hasard a voulu que Pierre Lacotte nous quitte à Pâques, lui qui s’était donné pour mission de redonner vie aux ballets.