
La Voie de l’écuyer à Versailles : Bartabas porte l’art équestre au sommet
Salué pour ses créations avec le Théâtre équestre Zingaro, Bartabas a plus d’une corde à son arc : il est aussi le maître de ballet des chevaux de l’Académie équestre de Versailles. Dans une structure imaginée par Patrick Bouchain, il fait revivre la Grande Écurie à travers un spectacle qui mêle arts et tradition, pour mieux mettre à l’honneur le Cheval.
« Pour moi, il n’y a pas de transmission du savoir équestre sans développement d’une sensibilité artistique. C’est pourquoi, ici, l’apprentissage du dressage se conjugue avec la pratique de la danse, du chant, de l’escrime artistique ou du Kyudo… »
Fidèle à sa propre voie depuis près d’une trentaine d’années, le dresseur-chorégraphe réussit un geste de passeur, celui qui consiste à initier le grand public aux finesses et à la rigueur du dressage académique par le biais de l’émotion, la surprise, le talent. Avec lui, les chevaux excellent, servis par une confiance et un amour inconditionnels.
Mais revenons d’abord sur les lieux : lorsque nous pénétrons dans la salle du manège, la structure en bois de Patrick Bouchain nous fait immédiatement basculer dans le monde du spectacle, reproduisant avec élégance les volumes d’un théâtre à l’italienne. Sur le sable, éclairé de la seule lueur de quelques lustres de Murano, trois fières archères vêtues de noir s’avancent lentement et saluent le public (les costumes sont signés Dries Van Noten). Leur démonstration de Kyudo, le tir à l’arc japonais, sert de coup d’envoi aux différents tableaux qui composent la Voie de l’écuyer.
Fil rouge du spectacle, un écuyer monté sur un cheval blanc revient à intervalles réguliers pour décliner les allures du cheval, tandis qu’une voix off égrène quelques idées fondamentales sur la relation qui unit cet animal à l’homme. Les tableaux en sont une parfaite illustration : qu’elles soient montées comme des destriers par des escrimeurs, chevauchées par des chanteuses de chant grégorien ou encore dirigées à terre aux longues rênes, les superbes montures de l’Académie – lusitaniens, criollos argentins, sorraias – brillent par leur travail précis et enlevé.
Chaque année, le spectacle est aussi l’occasion de présenter les progrès effectués par les chevaux et les écuyers au cours de la saison. Pour cette édition, il s’enrichit en outre d’un tableau final inspiré d’une pièce de Carolyn Carlson (We were horses, 2011), dans lequel des voltigeuses dressées sur les selles de leurs chevaux, les rênes fixées dans leur ceinture, exécutent une chorégraphie aux accents résolument carlsoniens.
Mais le clou du spectacle a eu lieu quelque temps auparavant – dans un de ces moments où le réel se teinte fortement de magie. Sur la piste, pratiquement livrés à eux-mêmes, quatre chevaux à robe blanche et un de robe noire s’adonnent à ce qu’on ose à peine qualifier… d’improvisation ? Mais quel autre mot sinon… Sans doute guidés par les changements de rythme de la bande musicale, ils nous émeuvent par la tendresse de leurs rapports, leur synchronisation et leur sens de la scène. Nous en restons ébahis.
Un spectacle d’une grande qualité esthétique et à la tenue irréprochable. Gageons que vous ne regarderez plus le dressage du même œil par la suite… Attention toutefois : si les enfants sont admis à partir de 5 ans, les hôtesses vous rappelleront à l’entrée qu’ils doivent se tenir calmes pendant toute la durée du spectacle (1h20).
Visuels © Agathe Poupeney
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