
Endo, l’action painting délirant de David Wampach éclabousse Montpellier Danse
David Wampach est un archiviste, ou plutôt un ré-activateur. Le lauréat 2011 de la Villa Kujoyama qui s’est déjà attaqué au Sacre du printemps (SACRE) et à Casse-noisette (CASETTE) s’amuse avec ENDO à donner une version très techno de l’action painting. C’est drôle, dément et talentueux et c’est à voir ce soir à l’Agora.
Un panneau bien blanc nous attend, là, posé, quand dans la pénombre arrive un drôle d’animal aux allures de poule. Les bras battent des ailes sur le corps nu couvert d’une demi-robe de Tamar Shelef. Puis après sa disparition, le coq David Wampach fera aussi le show sur du rock italien des années 60. C’est gagné, nous sommes perdus, complètement, juste bons nous aussi à nous faire cuire comme des volatiles.
Puis, c’est l’explosion, la musique devient techno. Aux beats incessants répondent les impacts des danseurs sur le mur blanc. Ils le recouvrent de peinture dans une danse qui mixe les pas des performeurs des années 70 et ceux des raveurs des années 90. Tamar Shelef reste digne dans des lignes que le sol devenu patinoire rend acrobatique. David Wampach est un clown de talent qui décale en engageant tout le corps dans des drôles de rebonds à la tête comme désaxée, hystérique.
ENDO est une réflexion sur la trace. Wampach s’est intéressé au courant endotique dont Bacon est le chef de meute, et une chose en entraînant une autre, cela l’a poussé à réfléchir au mouvement Gutaï « corps/concret ».
Le résultat est un engagement délirant du corps, qui devient peintre et pinceau. On a la sensation qu’ils sont défoncés au plaisir de s’enduire et de devenir ainsi des sculptures tentant de retenir les chutes. Cette question de la trace croise celle de l’équilibre. On pense à Quando l’uomo principale è una donna, ce solo huilé que Jan Fabre a écrit pour sa muse Lisbeth Gruwez. ENDO n’est pas dans dans le sexuel, il est dans le cirque et, dans les jeux du cirque, ce malin cherche la faille. Va-t-il faire gicler la peinture trop loin, doit-il s’accrocher à elle pour ne pas s’étaler dans cette constellation bien abstraite de bleu, orange, doré… ?
La technique de David Wampach et Tamar Shelef est hallucinante. Leurs corps sont des jouets qu’ils maîtrisent totalement. Ils s’amusent comme des gosses à qui on a dit « OK, jette toi dans la peinture, on prendra une douche après ». Ils incarnent, elle la retenue, lui l’urgence dans un décalage délirant avec l’instant.
Jubilatoire.
Le Festival Montpellier Danse se poursuit jusqu’au 7 juillet.
Endo ©Martin Colombet