
« Lieutenant à 19 ans dans les tranchées » : la correspondance libre et émouvante de Henri Sentilhes
Présentée par la famille du jeune lieutenant blessé au front en 1916 et par deux historiens Nadine-Josette Chaline et Stéphane Tison, l’abondante correspondance de Henri Sentilhes avec ses parents est éditée aux éditions Points de vues. Une mine d’or d’informations et d’émotions.
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En août 1914, le jeune Henri Sentilhes est en train de préparer Saint-Cyr dans un lycée spécialisé, quand la guerre éclate. Formé en accéléré, il est envoyé comme lieutenant au front, d’où il écrit abondamment et de manière très libre (peu de censure et une belle communication inter-générationnelle) à ses parents. Blessé à la tête en 1916, il subit deux trépanations et ne se remettra jamais physiquement (il a perdu 8/10 de sa vue ce qui lui bloque une grande carrière dans l’armée), ni moralement (un passage en chambre noire à la Salpêtrière l’a traumatisé). Ce qui n’empêchera pas le combattant de faire 11 enfants avant de mourir en 1945.
Très vivantes, d’une liberté surprenante, les lettres de Henri Sentilhes rendent compte de la peur, la saleté, la fraternité du front. Des valeurs patriotiques aussi, même si elles contiennent parfois de la désapprobation ouverte vis à vis des supérieurs: par exemple dans la narration (très rare) d’un épisode de mutilé volontaire condamné par la cour martiale et tué pour l’exemple.
Enfin, dans ce beau livre magnifiquement présenté et illustré, les lettres sont complétées de visuels pris par l’auteur : en effet le jeune homme est parti avec un appareil photo!
Un texte rare et puissant que l’on sent porté par toute une grande famille passionnée par un personnage, qui, après la bataille est resté très discret sur ce passé.
Henri Sentilhes, Lieutenant à 19 ans dans les tranchées, Lettres à ses parents, editions point de vue / Société historique et archéologique du Maine, 300 p., en librairies depuis octobre 2013.
visuel : couverture du livre