Cinema
De noche los gatos son pardos de Valentin Merz

De noche los gatos son pardos de Valentin Merz

05 December 2022 | PAR Nicole Gabriel

Dans le cadre du festival Chéries-Chéris qui vient de se tenir au MK2 et au Brady, nous avons été agréablement surpris par le long métrage baroque de Valentin Merz, mélangeant plusieurs genres cinématographiques : horreur, érotisme et humour.

Chat noir ou chat gris?

De noche los gatos son pardos (2022) du cinéaste suisse Valentin Merz (qui a passé plusieurs années au Mexique) nous conte l’histoire d’un groupe de jeunes gens qui se lance dans un tournage de film homo-érotique. Un film en costumes, dont l’action se situe aux confins de la France et de la Confédération helvétique. Tout laisse à penser que la mise en abyme, en théorie sophistiquée se heurte au low budget de la production. Comédiens et personnel technique s’expriment en toutes les langues : en allemand, en anglais, en français, en espagnol et, bien sûr, zb schwyzerdütsch. On se côtoie, on se mélange, on se dédouble, on change et échange les rôles.

Une actrice porno a été spécialement recrutée, de même qu’un agriculteur du coin. Le metteur en scène a tôt fait d’entrer dans le champ et pour se joindre aux ébats. Le libertinage, sujet du film, étant volontiers partagé. Le directeur de la photo, dont le seul mérite est d’être le petit copain du réalisateur, entre lui aussi dans la danse. Comme il est de tradition depuis au moins les chefs d’œuvre du regretté Jean Rollin (cf. La Méduse ou La Vampire nue), tout ce petit monde est hébergé dans une demeure seigneuriale et servi par un majordome tiré à quatre épingles. Si de nuit les chats sont gris, de jour, les comédiens continuent à jouer des scènes en tenue légère dans les bois environnants.

Le bois de mon cœur 

La forêt est le pivot du film. L’endroit est mal défini. Comme on dit en allemand, c’est la nuit que toutes les vaches sont noires. Mais, plutôt que de se référer à Goethe, Valentin Merz dépeint les futaies des Ardennes, le décor de Comme il vous plaira. Shakespeare est l’ancêtre des théories du genre : dans ses pièces, chaque protagoniste passe allègrement d’un sexe à l’autre. Au milieu de l’opus, coup de théâtre : le metteur en scène disparaît, on peut penser dans la forêt. On le cherche dans le noir. La police vaudoise à l’accent nonchalant procède sur un mode courtois à des interrogatoires serrés. Comédiens, machinos et gendarmes arborent divers accoutrements, rappelant un peu ceux de Village People. Jean-Charles de Quillacq joue l’inspecteur, narquois et mystérieux, une boucle à l’oreille.

Passant alors du coq à l’âne, façon Hellzapoppin, le film change de ton. Le dernier épisode montre la découverte du cadavre de metteur en scène; y est décrite son exhumation; une séquence est consacrée à son transfert vers… le Mexique, comme par hasard. Les derniers plans du film présentent la façade du Rex, une salle de ciné du bon vieux temps. Les cinéphiles distingueront apposées sur les murs extérieurs des affiches anciennes. L’une d’elle est celle de L’Amant de Lady Chatterley (1981) de Just Jaeckin avec Sylvia Kristel; l’autre, l’Invasion des morts-vivants The Plague of the Zombies (1966) de John Gilling. Deux clins d’œil, en passant, à des films de série B.

Visuel : photogramme de De noche los gatos son pardos (2022) de Valentin Merz.

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Nicole Gabriel

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