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La toute première rétrospective « GRECO » ouvre cette semaine au Grand Palais !

La toute première rétrospective « GRECO » ouvre cette semaine au Grand Palais !

16 October 2019 | PAR Chloé Coppalle

« GRECO » est la toute première rétrospective consacrée au peintre, de son vrai nom Domínikos Theotokópoulos. Pour l’occasion, le Grand Palais se lance le défi de présenter un artiste peu exposé en France, autour d’un parcours visant à faire découvrir l’ensemble de sa carrière et l’évolution de son style pictural, influencé par ses rencontres, ses villes et ses commandes. 

Une rétrospective dense et bien pensée pour mettre à l’honneur le célèbre artiste grecque !

Les murs sont blancs, le sol est en parquet, on se croirait dans une grande galerie. Et pourtant, c’est au cœur du Grand Palais que se déroule l’exposition ! La sobriété choisie pour l’accrochage a été retenue pour deux raisons : le blanc ne modifie pas les couleurs exposées, et met en valeur les gammes chromatiques si singulières du Greco. Au Louvre par exemple, le blanc avait permis de révéler cet été une Joconde bien moins jaune qu’elle en avait l’air ! Sa peau paraissait plus claire, le ciel derrière elle plus bleu, les couleurs étonnement plus éclatantes que ce que le public avait l’habitude de voir. Ce choix du mur blanc apparaît donc justifié pour une première exposition mettant à l’honneur un artiste tant attaché aux couleurs tel que le Gréco ! De plus cet accrochage étant propre aux époques contemporaines, il l’inscrit dans une compréhension moderne, en « souten[an]t le regard contemporain que porte le public sur son oeuvre », explique les deux commissaires Guillaume Kientz, conservateur de l’art européen au Kimbell Art Museum, et Charlotte Chastel-Rousseau, conservatrice de la peinture espagnole au Musée du Louvre, dans le communiqué de presse.

L’exposition expose 75 tableaux, nombre pouvant paraître énorme pour une première grande exposition, et en même temps assez réduit pour une rétrospective. Mais l’avantage de ce nombre limité est de ne pas sentir assommé par le parcours, comme ça peut être le cas lors des très grandes expositions, avec des centaines d’œuvres, préservant ainsi la concentration du public jusqu’au bout ! Le choix d’un parcours chronologique est d’ailleurs particulièrement bien pensé car l’évolution stylistique du Greco devient visible, tant par les thèmes choisis que par la facture. L’avant-dernière salle propose même une sorte de synthèse de cette approche grâce au thème du Christ chassant les marchands du Temple. Un alignement de quatre toiles représentant ce thème propose une comparaison condensée des tableaux, pour comprendre explicitement le changement de style pictural du Greco au cours de sa carrière. 

Une exposition qui fête la couleur ! 

Le public découvre une ingénieuse galerie de portraits présentant des œuvres rares en France comme le magnifique Portrait du cardinal Niño de Guevara. La scénographie souligne l’ensemble des règles stylistiques réutilisées par le Greco pour chaque commande. Tels des tableaux flamands, le fond est neutre, souvent marron foncé, illuminé par une légère touche de peinture blanche contournant les figures pour les faire ressortir de cet univers sombre. Les modèles sont représentés de trois quart, presque toujours tournés vers la gauche. Les bords de la toile coupent les représentations du corps au niveau des genoux ou de la poitrine, et tous sont vêtus de vêtements indiquant leur statut. Sans cet accrochage, il aurait été bien plus difficile de comprendre comment l’artiste a reproduit des types de compositions au fil des tableaux. De plus, les expôts sont parfois accompagnés de reproductions d’autres œuvres du peintre, ou de créations d’autres artistes ayant influencées le Greco. Ces images accolées éclairent le visiteur quant au processus de création du célèbre peintre.

Mais surtout, le point fort de l’exposition réside dans le sujet lui-même : les couleurs. La régularité de l’utilisation de gammes chromatiques vives, non naturalistes et pétantes, est particulièrement unique pour l’époque en Occident. A partir de 1575 et surtout après 1600, le peintre grecque se détache des compositions classiques de la Renaissance italienne et des couleurs naturalisantes. Très différent à la fois de la production artistique d’Europe du Nord, d’Italie, ou de la France à la même époque, les gammes chromatiques du Greco vibrent dans l’œil, se répondent, se contrastent,  ou harmonisent le tableau. Les touches orangées presque fluo du Songe de Philippe II frappent l’œil et apportent une énorme intensité à la toile, bien au delà du sujet même ! Les rouges sont entre le rose et magenta, les corps sont déformés et deviennent au fil du temps gris bleuté comme le corps du Christ dans la Pietà de 1580-90. Le violet fait également son apparition pour apporter de la douceur au sujet, mais intrigue aussi car nous ne sommes pas habitué à voir ce type de gammes chromatiques dans des tableaux religieux. Dans Saint Martin et le pauvre, le blanc pur du poitrail du cheval illumine un tableau porté par le bleu affirmé du ciel, accompagné par le vert royal couvrant les deux personnages.

Pour un artiste dont cet événement est la première rétrospective, l’enjeu est de taille : peu exposé dans une vision d’ensemble, le déroulement de l’exposition est pertinent, et aide particulièrement bien les visiteurs à comprendre les fils directeurs de son travail. Témoignant des aspects picturaux et stylistiques qui intéresseront les artistes français de la fin du XIXème et du début du XXème siècle, « GRECO » présente des œuvres majeures dont il faut profiter cette année, du 16 octobre 2019 au 10 février 2020 !

Visuel : GRECO (Domínikos Theotokópoulos), L’Adoration du nom de Jésus, dit aussi Le Songe de Philippe II, vers 1575-1580, huile et tempera sur panneau, 55,1 × 33,8 cm, Londres, The National Gallery Photo © The National Gallery, Londres, Dist. RMN-Grand Palais / National Gallery Photographic Department

 

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