Arts
Années 80 au MAD

Années 80 au MAD

27 December 2022 | PAR Nicolas Villodre

Le musée des Arts décoratifs présente jusqu’au 16 avril 2023 une belle exposition ayant pour titre Années 80 et pour sous-titre Mode, design et graphisme en France. En treize thèmes entremêlant politique culturelle et création artistique dans différents domaines, les commissaires Amélie Gastaut, Karine Lacquemont, Mathilde Lecorre et Sébastien Quéquet, assistés de Madeleine Jacomet nous téléportent quarante ans en arrière et quelquefois un peu plus.

Dessin, dessein, design

Au milieu des productions de la génération Mitterrand (et Lang) du design français (Olivier Gagnère, Elizabeth Garouste et Mattia Bonetti, Martin Szekely, Andrée Putman, Philippe Starck) trône et tranche une œuvre du pionnier transalpin Ettore Sottsass (1917-2007), chantre, à un moment donné, de l’anti-design : la bibliothèque totémique et polychrome Carlton (1981) éditée par le groupe Memphis. Le représentant le plus populaire du design hexagonal, Starck, a droit à un traitement de faveur, avec un échantillonnage de meubles et objets caractéristiques d’un style à base de courbures aiguisées. 

Tandis qu’est présente dans le catalogue et l’expo la créatrice punk Vivienne Westwood qui, à l’instar de son alter ego situationniste Malcolm McLaren, pratiquait volontiers le détournement, ne sont montrés ou simplement mentionnés ni le groupe Bazooka, qui prôna la dictature graphique jusqu’au début des eighties, ni le magazine Actuel, qui vira de l’underground – aussi bien dans la bande dessinée que dans la musique – au décalage BCBG cher aux gens de la pub, de la contre-culture soixante-huitarde au goût partagé par tous (la fusion, la bossa nova, la world music, le papier glacé, etc.), incarnant d’une certaine manière le passage aux “années fric”.

JPG & JPG

La bonne idée des commissaires et des scénographes est d’avoir jalonné le parcours de l’exposition de robes et costumes prouvant que les créatifs sont des créateurs en puissance. Les années 80 étaient celles du relativisme ayant tendance à confondre art majeur et mineur, art pur et appliqué, art pour art et déco. Gainsbourg, qui se rêvait en peintre nabi ou en poète Dada, savait qu’il faisait dans la chansonnette. Le presque 1% du budget de la culture élargit sa base à la mode, la réclame, la cuisine, la BD. Pour ce qui est de la couture (qui rime avec culture), les réalisations sont artisanales et artistiques. Des stylistes comme Lacroix ou Gaultier, adeptes de la citation, voire du rétro, font date sans dater. Après un admirable défilé de robes et costumes signés Senneville, Marithé + François Girbaud, Mugler, Montana, Castelbajac, Kawakubo, Kenzo, Miyake, deux stands portent au pinacle Lacroix et JPG.

Un autre JPG, Jean-Paul Goude, marque cet âge d’or de la mode, de la pub et du design, avec sa présence dans différentes sections : la photographie, avec l’accrochage de deux splendides clichés de format carré, Grace Jones à la cigarette, profil de Mounia au long cou; le film, dans un montage diffusant en boucle les spots publicitaires de l’époque, dont ceux de Chatilliez et de Mondino; l’événement historique ou l’événementiel que fut son défilé célébrant le bicentenaire de la Révolution française, qui ft la première page de Libération et l’objet de 9 tirages photographiques avec des personnages symbolisant la diversité ethno-culturelle de l’humanité.

Visuel : Jean-Paul Goude, Royaume-Uni, Londres multi-ethnique sous la pluie, Carnet du bicentenaire de la Révolution française, 1989 © Jean-Paul Goude.

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Nicolas Villodre

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