Politique culturelle
Mathilde Vincent, du MAIF Social Club : “La médiation crée des ponts entre les publics et le propos artistique”

Mathilde Vincent, du MAIF Social Club : “La médiation crée des ponts entre les publics et le propos artistique”

02 June 2023 | PAR Amelie Blaustein Niddam

C’est sur les canapés très douillets de l’espace enfant du MAIF Social Club que nous avons parlé médiation avec Mathilde Vincent. Suivez la guide !

Pouvez-vous vous présenter, nous dire depuis combien de temps vous travaillez dans ce lieu merveilleux ?

Je suis Mathilde Vincent, je suis chargée de médiation et développement des publics du MAIF Social Club et cela fait six ans. Je suis là depuis l’ouverture du lieu, depuis la toute première exposition.

Avec ce poste-là ?

Non, au tout départ, je m’occupais des visites guidées des expositions. Au fur et à mesure, mon poste a pris de l’ampleur. Il y a toute la partie médiation. C’est-à-dire de penser les visites guidées pour tous les publics, aussi la médiation écrite, notamment tout ce qui est livret jeu pour les 6 10 ans, ça va être de penser à créer des nouveaux outils de médiation comme Le partenariat qu’on a eu avec Lunii, la boîte à histoires, sur l’exposition Le Chant des forêts, qu’on va continuer sur la prochaine, donc c’est vraiment penser toute la mutation pour les différents types de publics. Toute la question de l’accessibilité aussi pour tous les types de handicaps et la partie développement des publics, donc faire venir de plus en plus de monde, mais aussi diversifiés, que ce soit du côté scolaire, périscolaire, associatif.

Expliquez-nous ce qu’est la médiation…

C’est un mot qui appartient au champ lexical du domaine judiciaire, où on fait appel à un médiateur. Je ne résous pas des soucis mais mon objectif, c’est de créer un lien, des liens entre un propos artistique et des publics. Parce qu’avant, on pensait qu’il n’y avait qu’un public et depuis une quinzaine d’années, on s’est rendu compte que non, il n’y a pas qu’un public, il y a plein de publics différents et il faut pouvoir parler à ces publics. On ne va pas créer un lien de la même manière avec un enfant de quatre ans et avec une personne adulte qui est férue d’art contemporain, par exemple. La médiation cherche à créer des liens, des dialogues, des ponts entre ces publics-là et le propos artistique notamment.

Combien êtes-vous dans ce service médiation ?

Nous sommes trois et nous travaillons avec des intervenants extérieurs extrêmement spécifiques. Pour les visites gustatives, nous travaillons avec Lila Djeddi, pour les visites musicales, avec Clara Germond et pour les visites contées : Florence Desnouveaux et Violaine Robert. À chaque fois, on travaille en duo, on va vraiment préparer les visites, ça ne se fait pas juste comme ça. Enfin, il y a tout un travail en amont.

Vous partez toujours de l’exposition pour vos méditations ?

En fait, ce qui est plutôt rare dans les lieux culturels, c’est que la médiation est là dès le départ au MAIF Social Club. J’assiste à toutes les réunions de construction du projet d’exposition. Les publics sont présents dès le départ de la réflexion.

Il y a quelque chose de particulièrement touchant, c’est votre attention portée aux très petits. Les lieux culturels pour les moins de 3 ans sont rarissimes.

C’est assez récent, cela est venu d’une observation : dans une famille, il n’y a pas que des enfants à partir de cinq ans, six ans. Il y a aussi des tout petits. La naissance des visites pour les 2-5 ans est venue de l’idée d’une médiatrice. Le MAIF Social Club propose des spectacles pour les enfants dès six mois, mais pour le moment il n’y pas encore de visites bébé, peut-être que ça viendra, nous n’avons pas encore l’expertise. Pour nos très jeunes publics, nous choisissons un moment où effectivement, y a du calme, le samedi à 10 heures. C’est au moment de l’ouverture. Ce sont des visites de 30 minutes pour ne pas perdre l’attention, mais parfois ça dure 45 minutes quand on arrive à bien embarquer le groupe, l’équipe de médiation adapte. La visite se concentre alors sur le toucher, sur le ressenti. Il ne faut pas chercher à rester trop concentrés sur les œuvres. Ces visites pour les jeunes enfants sont des moments de balade. On touche, on traverse, on embarque. Nous avons mis en place des nouvelles visites avec 2 conteuses pour les 2-5 ans qui fonctionnent aussi qui fonctionnent aussi très bien.

Et dans ce cas, le conte est une déambulation ou est-ce que c’est un lieu fixe ?

C’est une déambulation. En réalité, à chaque fois qu’on travaille avec d’autres personnes pour les visites, on va envoyer une présentation, on va les rencontrer, on va raconter les œuvres et l’idée.  Et l’idée, c’est de pas être fixe dans un lieu, c’est de se balader, d’être devant les œuvres et de toujours faire le lien entre ce qui va être raconté et les œuvres qui sont en place.

Quelle est la jauge pour les 2-5 ans ?

C’est une jauge de quinze à vingt personnes, parents compris.

Un autre sujet très intéressant, c’est celui des publics empêchés.

Pour tout ce qui est grand public, on a une page accessibilité, vous avez tous les services qu’on  propose. Notamment, on a un partenariat avec souffleur d’images qui est un service de souffleur de sens. Il y a pas mal de musées qui sont en partenariat avec eux. Donc en fait le principe des souffleurs de son ce sont des étudiants en arts, en histoire qui sont formés en Fait pour souffler les œuvres à des personnes qui sont soit en déficience soit complètement aveugles, donc c’est un service est totalement gratuit.

Il souffle au sens théâtral ?

C’est vraiment de la description poussée, extrêmement détaillée. Pour que la personne puisse visualiser le plus possible dans sa tête, l’œuvre ou le spectacle qui va être en face d’elle. C’est un service gratuit auquel le public peut faire appel. Les gens appellent ou envoient un mail trois semaines avant l’événement et Souffleur d’images va réserver un bénévole. Ils vont se rencontrer ici et ils vont pouvoir faire la visite. On a aussi un partenariat très récent avec l’Institut national des jeunes aveugles. Donc c’est une école qui accueille, de la primaire au lycée, des élèves qui sont en déficience ou aveugle. Avec eux, on a réalisé des visites plus spécifiques.

On a reçu des lycéens la semaine dernière, on a fait une visite musicale, qu’on propose aussi pour le grand public. On prend le temps de les recevoir, de préparer la venue et la visite, pour voir s’il y a des choses qu’on doit adapter ou pas, les œuvres qu’on va choisir et donc là pour cette visite c’était un dialogue avec une médiatrice et la violoncelliste. On travaille à la fois sur le grand public, sur des services spécifiques mais aussi sur les groupes. On a aussi des classes LSF, donc des enfants qui sont sourds, qui pratiquent la langue des signes qui sont rue de Turenne donc il y a les classes élémentaires, les maternelles qui accueillent ces classes. On travaille avec une interprète ou une interprète. La méthode est la même, c’est une médiatrice et un interprète.

Et pour des personnes âgées qui ont des difficultés à se déplacer ?

Nous sommes en lien avec des associations de retraités et des maisons de retraite. De façon plus ponctuelle, nous prenons en charge le transport si la marche est difficile. Et puis on va adapter, on a des petits tabourets qu’on transporte dans l’exposition, on va prendre le temps aussi. C’est toujours la même démarche, tout commence avec un moment de préparation avec l’équipe d’encadrement qui va venir avec ces personnes. On travaille aussi avec des associations. J’ai des personnes qui sont en situation de handicap psychique, qui sont en train de travailler sur des projets professionnels. On travaille avec l’association Vivre, notamment avec qui on crée souvent en ce moment. Par exemple en proposant l’atelier cuisine, parce que ce sont des personnes qui ont plus de mal à faire des menus, à faire les courses, et cetera. Donc, on travaille beaucoup avec Leila sur ce public pour pouvoir les accueillir à la fois sur la visite et pendant un atelier.

Quel est votre plus joli souvenir de médiation ?

Alors, il y en a beaucoup. Il y a une phrase que j’aime beaucoup. C’est quand un enfant dit “Ah déjà ! C’est fini ?” J’aime beaucoup ! Quand je ne m’occupais que des visites, j’avais suivi une famille dans laquelle la maman était enceinte. J’ai ensuite vu le bébé sortir, marcher, parler. Voir les enfants grandir d’exposition en exposition c’est merveilleux.

Est-ce que vous pourriez dire que la médiation participe de l’esprit vraiment famille du MAIF Social Club ?

Je pense que oui. Les gens viennent parce que le propos est de qualité, la programmation et qualité. Je pense que le fait qu’on pense la médiation dès le départ et qu’elle est intégrée au projet donne cette envie de revenir. Les publics savent qu’ils vont passer un bon moment avec nous

 

Toute la programmation du MAIF Social Club est ici.

Visuel : 

  • 1ère photo : ©Louise Carrasco
  • 2ème photo : Antonia, médiatrice culturelle, en visite guidée famille, ©Jean Louis Carli/MAIF
« Lien de sangs » d’Ivan Roussin: blood, sweat and tears
“Breaking the Waves” acclamé à l’Opéra Comique
Avatar photo
Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration