Le Buzz
Le Vaudou à Strasbourg : pour en finir avec les poupées

Le Vaudou à Strasbourg : pour en finir avec les poupées

20 January 2014 | PAR Geoffrey Nabavian

Marc Arbogast, ancien homme d’affaires, expose à Strasbourg une partie de sa collection d’objets issus des cultes vaudous d’Afrique dans un musée permanent, ouvert avec ses fonds. Le but de son initiative : enseigner aux visiteurs les véritables fonctions de ces fétiches, statuettes et autres autels.

VaudouC’est une première en Europe : à Strasbourg, dans un ancien château d’eau du quartier de Koenigshoffen, s’ouvre cette semaine un musée du vaudou -ou « vodou », si l’on remonte à l’origine du mot. « Pas de poupées à épingles ici » nous promet son fondateur, Marc Arbogast, ancien pdg des brasseries Fischer et Adelshoffen, qui possède une collection de 1060 pièces toutes issues des cultes vaudous d’Afrique, principalement récupérées au Togo, au Bénin, au Ghana et au Nigéria. Dans cette structure, 220 pièces vont être exposées : des fétiches, servant à la réalisation de vœux, des statuettes représentant des dieux, des autels portatifs, des costumes destinés aux revenants, qui les revêtent pour danser, ainsi que six « têtes » de « bokonos » -les devins vaudous, dont les crânes étaient conservés et ornés au fil des hommages.

Le culte vaudou –né dans le Sud du Bénin actuel, où se trouvait l’ancien royaume du Dahomey, puis arrivé, du fait de l’esclavage, dans les Caraïbes, puis en Louisiane– a souvent mauvaise presse, du fait de cette importance accordée au respect des ancêtres, qui se manifestent de façon régulière auprès des vivants. Les deux univers aiment à communiquer par l’intermédiaire de certains fétiches, auxquels sont faits des offrandes et des sacrifices d’animaux. Les disparus sont encore là, et les fétiches vivent. Le cinéma de Hollywood, notamment, a fait de ce culte un objet de crainte, qui, en même temps, fascine quelque peu : la Nouvelle-Orléans, le Mississippi, les bayous, la magie noire… Le fondateur du musée désire éclairer cette fascination et chasser les mauvaises ombres : il remonte jusqu’au vaudou africain, qu’il aborde en tant que croyance. Nanette Jacomijn Snoep, conservatrice au musée du Quai Branly, souligne, lorsqu’elle est interviewée par France 3, qu’il s’agit là d’une « religion vivante », pratiquée encore aujourd’hui par des centaines de millions de personnes, en Afrique de l’Ouest, dans les Antilles et même aux Etats-Unis.

Prendre le vaudou africain comme une religion amène, selon Marc Arbogast, à comprendre véritablement à quoi servent les objets exposés. Ceux-ci ont pour constituants les matériaux les plus divers : bois, clous, tissus, ossements d’animaux, ossements humains, et même sang et crachat. Leur but est de contenir de l’énergie vitale. Ainsi, ils pourront par la suite « servir » aux vivants : ce sont des objets qui « servent tout le temps » confie le fondateur, interviewé par la chaîne de l’Agence française de presse. D’autre part, une fois compris, ils acquièrent une valeur esthétique digne de celle d’une œuvre d’art contemporain : « leur laideur est extrêmement belle » ajoute Marc Arbogast.

Pour le moment, le musée reste totalement ouvert au public le vendredi et le samedi. Le reste de la semaine, il peut se visiter sur rendez-vous. Peut-être pourra-t-il bientôt obtenir des subventions. En attendant, rendez-vous à Strasbourg pour découvrir ces objets, dont certains, aux dires du fondateur, auraient encore des pouvoirs… Faut-il y croire ? Pour commencer, regardons-les.

Visuel : © couverture du livre Vodou Voodoo, sous la direction de Nanette Jacomijn Snoep et Bernard Müller

Le maestro Claudio Abbado est mort
Gagnez 3×1 place pour la « Grems Buffy Release Party » à La Machine du Moulin Rouge le 1er février
Avatar photo
Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration