Une pièce de théâtre écrite par un enfant…dans un camp nazi
Claire Audhuy est étudiante à l’Université de Strasbourg et travaille une thèse sur le théâtre dans les camps de concentration nazis. Allant à la recherche de témoignages d’anciens déportés, comme nous l’explique l’article de Rue89 Strasbourg, elle reçoit un jour un appel incroyable de Prague…
Au bout du fil, une femme âgée se souvient d’avoir assisté à une pièce de théâtre dans le camp de Tezerin, en Tchéquie en 1943. C’est aux archives du mémorial de Tezerin que Claire Audhuy va faire cette historique découverte: une pièce de théâtre écrite clandestinement par un jeune garçon de 13 ans, Hanuš Hachenburg, avant qu’il soit envoyé à la mort au camp de Birkenau en 1944.
Le camp de Tezerin, ghetto de transit, servait à la propagande nazie par la production d’œuvres intellectuelles et artistiques, ce qui favorisa en effet la création clandestine. Un journal fut ainsi créé par un groupe de jeunes tchèques (visuel 1), et la courte pièce de théâtre pour marionnettes d’Hanuš Hachenburg, On a besoin d’un fantôme, y fut recopiée.
Cette pièce raconte, avec humour noir, l’histoire du roi Analphabète Ier qui veut que son peuple pense comme lui. Pour l’effrayer et asseoir son pouvoir, il décide de créer un fantôme royal qui serait constitué des ossements des personnes âgées de plus de soixante ans. “Rire dans le ghetto permettait de dépasser la douleur et l’inexplicable, de se prouver qu’on appartenait encore à ce monde. Aujourd’hui, qu’on puisse rire de la Shoah peut sembler immoral ou obscène, mais cette pièce est un témoignage que les internés s’informaient et tentaient de comprendre la machine nazie, qu’ils la raillaient, la disséquaient”, rapporte Claire Audhuy à Rue89 Strasbourg.
Un témoignage exceptionnel mais aussi un rire libérateur lancé par un enfant d’une grande maturité, presque terrifiante pour son âge. On a besoin d’un fantôme sort aujourd’hui de l’oubli en étant publié aux éditions Rodéo d’âme, prouvant ainsi l’incroyable force des enfants face à l’horreur.
Visuels: captures d’écran Twitter
