David Lescot ensoleille le Théâtre des Abbesses avec “Une Femme se déplace”
David Lescot a écrit une authentique comédie musicale joyeuse et étonnante. “Une femme se déplace” donne l’occasion à Ludmilla Dabo de confirmer son immense talent.
David Lescot aime les comédies musicales
Le spectacle est un spectacle complet. Il est une comédie musicale, un comique vaudeville, une pièce à thème, un conte à paraboles, un opéra-comique enrichi de tableaux de music-hall et d’une intrigue de science-fiction. Tout commence dans un restaurant. Nous voyagerons dans le temps et dans des lieux différents avec une entraînante vitesse. Nous sommes à Broadway; au fond du plateau une band de musique rock. Les chansons mériteraient d’être éditées, elles déclenchent des applaudissements. L’ensemble de la scénographique parvient à assurer à l’édifice fictionnel une vraisemblance, une légère déréalisation nécessaire et une éloquente fluidité. L’œuvre dans cette complétude impressionne.
David Lescot aime son prochain
L’intrigue tricote une expérience révélatrice à la façon des comédies américaines de Noël. On pense à La vie est belle de Capra ou de Drôle de Noël de Scrooge de Robert Zemeckis. Une femme possède tout, baigne de tout son corps et de tout son esprit dans un bonheur parfait. Elle expose tous les attributs d’une vie bourgeoise accomplie. Ce jour-là elle retrouve une amie dans un restaurant au snobisme absolu?; on y propose le concept de platitude, un plat et une attitude : le fade?! On se rit d’elles, et de nous. Cette femme va être confrontée à une suite de catastrophes?; la débâcle va fissurer, puis briser pour enfin renverser son édifice fantasmatique et ses certitudes. Derrière chaque apparente fortune se dissimulait un danger. C’est alors qu’un génie du temps, dissimulé dans un vaporisateur de poche va doter cette femme effondrée d’un pouvoir surnaturel, celui de revisiter sa vie pour réévaluer ses choix et leurs contingences. Par cette expérience, elle découvrira l’essentiel pouvoir caché dans l’autre, prochain bienveillant et dans un alter ego intime, cet autre en nous qui nous observe nous juge et nous articule. Elle pourra en fin de journée se libérer du carcan sociétal. Elle cessera de n’être que le sosie de la multitude. Elle trace le parcours d’une femme qui se déplace dans le temps pour ensuite pratiquer ce petit pas de côté qui la désaliènera. La parabole est délicieuse.
David Lescot aime Ludmilla Dabo
La troupe surprend par son implication et ses talents multiples. Autour de la merveilleuse chanteuse Élise Caron, l’hilarante Candice Bouchet ou le désopilant Jacques Verzier, chaque comédien danse, chante, joue et nous émerveille. Ils défendent les chorégraphies enlevées de Glyslein Lefever et assurent le spectacle. Et puis il y a Ludmilla Dabo (repérée dés 2016 avec la pièce JAZ, succès au OFF d’Avignon). La comédienne ne quitte pas le plateau durant les deux heures de spectacle. Elle est époustouflante. A la première note chantée un charme tombe sur la scène et parcourt la salle. Elle est une diva. David Lescot lui offre avec Une Femme se déplace un rôle inoubliable à voir jusqu’au 21 décembre aux Abbesses.
11 > 21 décembre 2019 • Théâtre de la Ville, Paris – Les Abbesses
27 et 28 février 2020 • Théâtre Molière-Sète, Scène nationale archipel de Thau
crédit photos Christophe Raynaud de Lage