
Darina Aj Joundi, Ma Marseillaise : Aux armes meuf !
Alain Timar met en scène dans sa maison, le Théâtre des Halles, Ma Marseillaise. Nous voila projetés de plein fouet dans le délire administratif auquel Noun (Darina Al Joudi) est confrontée pour avoir, quelle folie, choisi d’immigrer pour être libre.
La Marseillaise retentit dès les premières secondes du spectacle. Le plateau est parsemé de cinq paravents tendus de papier blanc qui laissent la comédienne se dessiner en ombre chinoise. Elle va devoir s’approprier une nouvelle identité, une marseillaise à elle. Noun est libanaise, elle habite à Beyrouth, un joli appart près de la mer, mais dans son pays, un homme la bat et tout le monde s’en fout, pire, c’est légal. Elle est comédienne, fumeuse, souvent amoureuse, alors elle décide de partir. New-York est trop bétonnée, Le Canada trop froid, ce sera Paris. La voilà en lutte dans le Château de Kafka.
On la retrouve le jour de sa naturalisation, “C’est aujourd’hui, c’est le jour, c’est mon jour”. Naturalisation, mot immonde dont elle s’amuse de la définition taxidermiste. Elle, la femme aux cheveux libres rêve d’une France laïque, où l’égalité règne. Elle y découvre ses islamistes radicaux, des femmes voilées de leur plein gré, des files d’attentes aux guichets, des après-midi perdus. Elle découvre comment le pays des Droits de l’Homme traitent ceux qui souhaitent y entrer. Comment le pays des Droits de l’Homme est près à accepter des compromis législatifs douteux.
Tout le temps qu’elle n’est pas française Noun a une carte de séjour, renouvelable de 9 mois en 9 mois, des demandes de papiers plus foutraques les unes que les autres pour obtenir le sésame compris dans le vocable «Les papiers». Tout ce temps là, elle «s’intègre”, tombe amoureuse, joue puisqu’elle est comédienne, libanaise, elle parlait déjà le français, mais là, elle maîtrise le “français français”
Le texte révèle des merveilles, elle dit “je veux juste marcher”, libre dans les rues, elle dit “dans mon pays on se bat contre ces chaînes et ici …”. Elle transforme son décor, les panneaux deviennent bureaux, appartement d’amies, buildings. Simple et ingénieux. Le jeu de Darina Al Joundi, née à Beyrouth, est sensible, sincère sans jamais tomber dans aucune fanfaronnerie où discours politique basique. C’est sa vie, son combat qui devient récit que l’on imagine forcement très inspiré de sa biographie. Faire spectacle des plaies identitaires françaises, sans sombrer dans aucun sentimentalisme est d’une force magique.
Ma marseillaise sera un rendez vous de la saison 2012/2013 à surveiller.
Visuel : (c) Sylvie Biscioni
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