Les troublantes Limaces de Fabián Barba et Esteban Donoso au Kunstenfestival
Jusqu’au 27 mai, et pour la 22e édition, Bruxelles pense et respire Performance. Installé dans toute la ville, le Kunstenfestivaldesarts permet plus que jamais d’expérimenter. Les danseurs et chorégraphes équatoriens Fabián Barba et Esteban Donoso s’amusent avec Slug’s garden à définir la notion même de perception.
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Slug’s… en anglais … les limaces. Et se plonger dans un jardin de limaces demande quelques précautions. La Bellone, superbe maison du spectacle créée par le peintre et scénographe Serge Creuz en 1980 est parfaite dans le rôle. Un couloir d’abord où Fabián Barba nous demande de patienter par groupes de cinq.
Dans une première antichambre, il faudra enlever ses chaussures, ses bijoux et laisser-là son sac. Dans une seconde, une pièce pensée par la plasticienne Anna Maria Gommez nous invite à plonger nos mains sous un tissu, à glisser dans un tube en voile ou à malaxer une texture cotonneuse. Puis nous entrerons dans le jardin. Un lieu clôt aux règles strictes. Les spectateurs doivent rester presque immobiles, assis ou debout et se laisser faire. Lâcher prise, totalement.
Fabián Barba a été formé à P.A.R.T.S, Esteban Donoso, psychologue a lui suivi des études de danse à l’Université de L’Illinois. Leur travail questionne la place du corps dans un espace particulier et déplace la fonction de spectateur qui ici est multiple. Si les “limaces” aux yeux clos et aux déplacements lents, toujours en contact avec ce qui est à leur portée, glissent sur vous, l’expérience est érotique. C’est aux prémices d’une partouze que nous sommes invités à assister, sans avoir le droit de toucher.
Pendant quelques minutes, une tête inconnue qui gardera les yeux fermés et le secret de son regard se pose sur vos cuisses. Un dos frôle votre dos, et bientôt les performeurs sont plusieurs, peut être trois, car si vos yeux sont ouverts ils ne peuvent pas voir partout. Si les limaces ne bavent par sur vous alors vous serez juste voyeurs, contraint à l’absence de geste. La frustration est ici belle car l’envie est folle de jouer avec eux. La danse revient à sa première base, avant même la marche, celle de l’écoute de soi, celle de la sensation de la relation des corps entre eux et de l’énergie qu’ils veulent produire.
Une immersion aussi drôle que perturbante est à ressentir jusqu’au 14 mai à La Bellone.
Tout le programme du Kunstenfestivaldesarts est ici.
Visuel : © Koen Broos