
« Chinchilla » Libre échange au coin du Boulevard
Auteur de nombreuses pièces de théâtre, telles que « Les Poissons ne meurent pas d’apnée », « Fume cette cigarette » ou encore « Riviera », Emmanuel Robert Espalieu signe une nouvelle comédie, Chinchilla, dans laquelle il s’empare d’un sujet inépuisable : l’amour.
Par Eloïse Bouchet
Deux couples dans un club échangiste.
On pourrait s’attendre à du graveleux et de l’humour facile. Pas du tout.
Car, ce qu’ils échangent, ce sont surtout les peurs subjacentes et la difficulté de vivre à deux.
Que faire quand la communication est rompue ? Quand l’un souffre d’un ego érodé ? Qu’il étouffe ses propres désirs pour que l’autre puisse assouvir les siens? Que les enfants éloignent plus qu’ils ne rassemblent?
Les deux couples, bien que très différents, se font miroir : leur rencontre les amène à faire face à leurs propres désirs. Le premier, heureux parents de dix (oui, dix) enfants, est habitué aux rendez-vous libertins. Le second, beaucoup plus embarrassé, fait sa toute première expérience pour pimenter sa vie conjugale qui s’étiole. La pièce s’ouvre sur une conversation scabreuse après qu’ils ont « échangé ». Dès cette première scène, l’essentiel se joue à l’ombre des mots, dans les silences et les sourires gênés. Jouant sur les différentes strates du langage et les modes de communication, la pièce dit la difficulté de rester soi, de garder une parole singulière et sincère, tout en étant deux.
Surenchère de mensonges, non-dits, dissimulations… La distance se creuse entre les personnages mais finit tout de même par se réduire (comédie oblige), grâce à l’apparition d’une idée très symbolique qui va unir à nouveau l’un des couples: l’adoption d’un chinchilla, ce petit rongeur à la tête de Mickey qui finit la plupart du temps en manteau de fourrure.
Servie par une mise en scène ingénieuse, signée Bruno Banon, et un très bon jeu d’acteur (en particulier celui de l’éblouissante Judith Caen), « Chinchilla » est une pièce légère et divertissante, qui se distingue des comédies lourdaudes qui abondent sur le sujet.
Une pièce écrite par Emmanuel Robert Espalieu et mise en scène par Bruno Banon.
Les samedis et dimanches, à 18h15, au Théâtre Les Feux de la Rampe.