Danse
 Véhicule lumière des transports amoureux, “Nos charmes n’auront pas suffi” de Mélanie Perrier

 Véhicule lumière des transports amoureux, “Nos charmes n’auront pas suffi” de Mélanie Perrier

19 May 2014 | PAR La Rédaction

Chorégraphier l’état amoureux sans pour autant montrer la rencontre de deux corps pour rendre visible, mettre en lumière, ses infimes résonances au travers de la chair. Travail quasi topographique appliqué à la surface asémique d’un dos, Nos charmes n’auront pas suffi plonge le spectateur dans une contemplation fascinée et par là même dans un simulacre d’état amoureux.

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Une lumière absinthe irradie peu à peu le plateau en prenant pour origine la danseuse même. La belle silhouette statique éclaire le fond de scène dans un halo mouvant qui confère à cette présence une aura souveraine. Par une très lente et subtile marche arrière, à peine perceptible, c’est notre regard qui s’approche d’elle et jouit des légers transports de poids, d’oscillations qui nous bercent délicatement tandis que la lumière s’estompe dans l’espace de la salle.
Puis la silhouette se dissout à son tour au profit d’une nouvelle image, recadrage serré aux contours palpitants, cœur cerné de lumière qui souligne à la manière d’un bas relief le modelé du dos. L’éclairage jaillissant des bordures du décolleté réagit à chaque inspiration, transforme la portion de peau en un objet autonome, rougissant par endroit ou laissant entrevoir des formes inattendues, telles ces deux nus qui se font face, à genoux, et semblent prêts à s’enlacer.
Entre l’examen quasi autopsique de cette zone ô combien émouvante, regard qui creuse et découvre les profondeurs non sans évoquer, sur un épaulement de tête, l’Ange anatomique de Jacques Gautier D’Agety, et la mise au jour d’un espace informel, échappant comme les nuages à toute tentative d’enfermement figural, le motif amoureux se construit dans l’absorption pénétrante et attentive d’un artifice lumineux qui révèle plus qu’il n’aveugle. Images vibrantes, veloutés, empruntes de la douceur de micro mouvements affleurant la surface de la peau, de cambrés opérant avec raffinement des métamorphoses formelles, le travail de Mélanie Perrier se situe à la lisière de l’image et de la Danse.
Reconduisant le travail d’exploration de la lumière comme outil chorégraphique qu’elle avait entrepris pour sa précédente pièce, Imminence, Mélanie Perrier signe là une proposition encore plus radicale mais toujours aussi poétique, nous donnant à contempler dans une temporalité suspendue et jusqu’au ravissement un idéal état amoureux. La pièce s’achève sur un dernier tableau lumineux, plus froid, plus dur peut-être, révélant des territoires accidentés de contrastes tout aussi captivants… qu’on laissera s’évanouir dans l’obscurité à regret mais dans l’attente de sa prochaine création.

Sophie Grappin

Programmé en amont de la dernière création de Myriam Gourfink, Souterrain, à 21h, Nos charmes n’auront pas suffi se jouera les jeudi 22 mai et vendredi 23 mai au Forum du Blanc-Mesnil dans le cadre des Rencontres Chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis. A 19h30, durée de 35 min.

Visuel :  ©Cie2minimum/M.Perrier

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