Danse
Et le corps de Gregory Maqoma parla

Et le corps de Gregory Maqoma parla

25 April 2013 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Comment ? Vous ne connaissez pas Jongumsobomvu Maqoma ? Cet illustre chef Xhosa qui libéra son peuple ? C’est un tort ! Heureusement le danseur virtuose Gregory Maqoma nous donne une belle leçon de rattrapage.

Le Théâtre de la Ville dans sa section Abbesses aime nous faire voyager. Avec Exit/Exist le ticket est double, vers le passé, et vers l’Afrique.

Tout commence par un coup de canon dont surgit une litanie portée par la guitare andalouse que fait pleurer Guilliano Modarelli. Le danseur est passé chez P.A.R.T.S, l’école d’Anne Teresa de Keersmaeker, ses tourbillons où la colonne vertébrale se fait spirale vous mettront vite la puce à l’oreille. Il se présente de dos, en costard blanc dans un geste ancré dans le XXIe siècle.  Il va remonter le temps, en appeler à ses ancêtres. Il invoque ses doigts qui se font bâton de sorcier. Seul le haut bouge et pourtant, on sent déjà ici le prélude à un feu d’artifice.

Il va devenir son ancêtre Jongumsobomvu Maqoma, mort en prison après avoir tenté de s’opposer aux colons anglais en 1873. Jusque physiquement il va réhabiliter sa mémoire sur un plateau où des petits tas de sable et de millets nous happent de plus en plus vers la terre, vers les profondeurs, vers les racines d’une oppression et de sa libération.

Lui, se sera mis à danser dans une fusion Afrique/ Europe. Ses omoplates qui l’entraînent vers l’arrière dialoguent  avec des petits pas à l’esthétique occidentale. Il va s’agir d’incarner la musique et maintenant les voix des quatre chanteurs gospels, au son boy’s II men assumé, qui disent l’histoire. “, ici, pour reprendre un terme emprunté au pianiste Chassol,  nous avons une danse “ultrascore” où les pas traduisent le langage des chants.

“Les chanteurs de louanges sont silencieux
Ce sont des bouches muettes
Ils sont couverts d’un sombre nuage L’hiver arrive et repart suivi de l’été
Et rien ne change même la saison des moissons
Puisqu’il n’y a pas eu de saison des labours”

Dans une interaction totale entre la poésie chantée, la musique et la danse, le récit se fait limpide sans être trop figuratif pour autant. Il ne s’agit pas de faire la leçon mais bien de rendre un hommage en sueur et en exigence à celui qui avant lui a lutté.

 Visuel (c) : autorisation Théâtre de la Ville

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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