
Delgres, un patchwork de blues à la maroquinerie
Difficile de pénétrer dans la salle de la maroquinerie. Il est 22h et Delgres, ce groupe alors encore peu connu fait déjà salle comble. Un pari qui s’annonce déjà gagné pour la PIAS nite mais surtout pour ce trio original et talentueux.
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Delgres pour Louis Delgres, un officier métis de Napoléon basé en Guadeloupe. En 1802, alors que Bonaparte souhaite appliquer de nouveau l’esclavage, celui-ci prend parti de se rebeller. Proche de ses convictions, il décide avec ses hommes de miner leur propre habitation, réservant une surprise explosive aux troupes françaises. « Vivre libre, ou mourir » une devise appliquée ici à la lettre, comme l’explique Pascal Danaë, le leader du groupe, lors d’une interview pour Qobuz. Un nom certes lourd de sens, mais que le trio de blues caribéen, complété de Baptiste Brondy (batterie) et Rafgee (Sousaphone) assume la tête haute.
Mo Jodi en français « Mourir aujourd’hui » est un premier album ambitieux et sincère. Un hommage à Louis Delgres mais aussi à la culture créole, le tout réuni par les premiers pas du blues et d’Ali Farka Touré, fusionné avec les Black Keys. Critique des oppresseurs et soutenant les opprimés, le trio endosse le rôle d’un justicier hors du commun, tout en effectuant un travail de mémoire exemplaire. Dans la salle, on chante créole et les déhanchés n’en finissent jamais. Voilà la force de ce power trio unique. Loin des concerts bobos qui se cherchent une identité originale, Delgres n’a fait qu’être fidèle à son point de départ et sa musique. Son rock hypnotisant (Mr President, Mo Jodi), ses ballades légères (Vivre sur la route) et sa soul explosive entraînent les corps et les esprits dans une danse collective que personne ne voudrait quitter.
Un véritable moment de partage et de sensations électrisantes à découvrir ou redécouvrir le 3 Décembre au Café de la Danse, ainsi que via l’album sur la plateforme Qobuz en Hi-Res.
photo : Melanie Elbaz