
Live report au Divan du Monde : Hannah Cohen, suivez cette voix…
D’abord ce qui frappe chez elle, au-delà d’une indéniable grâce et beauté, c’est la justesse de sa voix. Je sais, je sais, une jolie fille qui chante à peu près juste, la belle affaire que voilà…cela nous change peu, penserez-vous peut être , des quarterons de chanteuses que nous déverse à flot continu l’industrie du disque. Si j’ajoute que Hannah Cohen a été mannequin, je vous vois déjà vitupérer contre cette mode de mannequins audibles (ou inaudibles parfois, c’est selon). Seulement Hannah Cohen ne fait pas que bien chanter, elle chante beau. Et elle n’est pas un mannequin chantant, elle est de façon très évidente une chanteuse qui fit un temps le mannequin.
Hannah Cohen est issue d’une famille de poètes et musiciens. Mais son mérite va évidemment au-delà d’un simple atavisme placide, si prestigieux soit-il. Car Hannah Cohen est auteur compositeur et vient juste de sortir un superbe album, Child bride. Pour cela elle s’est entourée des musiciens d’Antony and the Johnsons, excusez du peu. Cela donne un album tout en épure, aux mélodies comme suspendues, avec une voix qui rappelle un peu celle de Julia Stone.
Son unique concert français, dans la très belle salle du Divan du Monde nous a amplement démontré que décidément Hannah Cohen était une voix à suivre. Elle est apparue, longue dame brune, très timide au premier abord, mais de cette timidité tout en hauteur qu’on ne retrouve que chez les tout jeunes enfants ou chez les chats. Et une fois sa guitare enlacée, triturée, accordée dans un tête-à-tête tranquille que le public suivait, patient, une belle évidence d’un grand talent déployé devant nous s’est vite installée. Car alors a opéré la magie de sa voix : cristalline, ondoyante, souffle et puissance à la fois. Une voix d’enfant, d’ondine, aiguë dans les textes graves qu’elle disait. Minimaliste jusque dans ses salutations, pas de mise en scène, peu de maquillage et pas de fioritures. Juste ce qu’il faut de sourires inachevés et de paroles murmurées, ses chansons faisant le reste. On avait rarement vu autant de présence chez quelqu’un qui semblait comme volontairement effacée derrière sa guitare, le rideau de ses cheveux à la Lauren Bacall qui lui mangeait la moitié du visage servant admirablement d’écran.
De beaux textes donc parfaitement ourlés par une musique minimaliste, des compositions et des textes d’inspiration dylanesque Dylan (Bob et Thomas), le concert de Hannah Cohen, accompagnée d’un seul musicien, a été une belle réussite. Mais il faut dire que l’ambiance ouatée du Divan des mondes, volutes de poussières, rideau de brocard, lumière taiseuse convenait parfaitement à sa musique. Formidable divan du monde d’ailleurs qui arrive à mettre en avant de jeunes talents prometteurs, jolie serre parisienne pour de jeunes pousses en quête de lumière. L’équipe entoure de quiétude rassurante ces artistes prometteurs. Ainsi à saluer la première partie de Hannah Cohen joliment assurée par une chanteuse à la voix grave Maud Lubeck.
Hannah Cohen, Child Bride sortie le 16 avril en France chez Cooperative Music.
Visuel : Pochette de l’album