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Grand Blanc plonge la Maroquinerie dans un rêve éveillé

Grand Blanc plonge la Maroquinerie dans un rêve éveillé

18 May 2023 | PAR Juliette Brunet

 La Maroquinerie a accueilli Grand Blanc ce mercredi 17 mai, pour un concert à l’occasion de la sortie de leur nouvel Halo. Le groupe a offert au public une parenthèse poétique, nous plongeant dans un rêve éveillé. La magie a pris toute la place, arrêtant le temps dans sa course…

Le nouvel album Halo du groupe Grand Blanc est sorti le 28 avril dernier, sur Parages, leur propre label. Après un EP et deux albums, Mémoires vives en 2016 et Image au mur en 2018, des tournées à cent à l’heure, en France et à l’étranger, Grand Blanc a décidé de poser ses valises dans la maison du temps. De cette coupure avec le monde de près d’un an sont nés des morceaux vaporeux, comme autant de pointillés poétiques, comme autant de perles de temps. Ces treize titres ont été enregistrés dans une maison à l’orée de la forêt picarde, en huis clos et en totale autonomie, et proposent, dans leur continuité et leur poésie, une expérience musicale immersive et délicate. Cet album est une cabane musicale pour les jours de pluie, un refuge d’harmonies pour échapper à la violence des villes, une petite pyramide où repose la douceur du monde.  

La naissance de Halo après la course du soleil

« Parmi toutes les histoires qu’on s’est racontées pour ne pas se perdre dans notre quête, on en a gardé une qui parle de quatre personnages venant d’un monde où la couleur a disparu, et qui décident de partir ensemble dans l’aveugle pour la retrouver. Ils ne savent pas s’ils y arriveront mais ils partent quand même ».

Les premiers rayons de Halo sont apparus dans le Delta du Danube en 2019. Alors en voyage en Roumanie, les quatre membres du groupe se sont arrêtés dans une maison de bois sur un îlot, petit refuge solide dans les remous du fleuve, avant ses retrouvailles avec la mer, au loin. Ils prennent le temps d’observer chaque détail du paysage, volant au silence quelques-uns de ses souffles sur un enregistreur. Quelques mois, plus tard, ils se retrouvent dans une vieille maison à la lisière de la forêt, en Picardie, chez Vincent, le bassiste du groupe. Ils s’y installent plus longtemps qu’à l’accoutumée, réaménagent le grenier en studio, et les mois s’enchaînent tandis qu’ensemble, ils « explorent le dehors et remplissent l’intérieur ».

L’intimité cotonneuse et la puissance douce qui se dégagent de l’album sont à l’image des liens resserrés entre les membres du groupe durant cette longue parenthèse créative. Cousu main, pigmenté avec les rêves, l’album a tissé une toile où se mélangent les aspérités du décor, les bruits environnants, les murmures de la pluie. En l’écoutant, c’est comme si on grimpait sur l’échelle d’une mezzanine au-dessus des nuages. C’est un voyage intérieur que l’on fait à plusieurs, une traversée immobile de nos états d’âmes.

 

Un label dans les Parages

« Un jour, en voulant dessiner un plan des Parages, on a imaginé une carte en 3D avec au milieu une maison, et on s’est dit que ce serait le nom de notre label. Une maison de disque qui serait juste notre vraie maison ».

Durant cette année, coupés du monde, ils ont arpenté la forêt au point d’en connaître les chemins par cœur, l’étendue de leur cocon dépassant petit à petit les murs de la maison. Devenus plus que familiers, les environs sont devenus leurs terrains de jeux et d’inspirations. Les parages, auxquels ils ont donné des noms inventés pour eux, sont devenus un espace hors du temps, où se confondent le réel tranquille et l’imaginaire en effervescence. Si bien qu’en en dessinant la carte, il est devenu évident que le label qu’ils allaient créer s’appellerait Parages. Pour garder un peu de ce lieu dans leurs prochaines créations, pour rendre hommage aux inspirations qu’ils y ont trouvées, pour se rappeler qu’il y a des endroits où le temps peut s’arrêter.

« Halo a été joyeux et dur parfois. C’est un disque fragile et nu, de chansons faites pour être emportées partout, jusqu’au milieu de nulle part, pour être chantées avec presque rien, pour habiter le silence. On l’a fait à l’abri, sous le vélux du grenier, quand les bruits des autres se sont tus et que le temps est rentré dans l’ordre. Halo est un disque dense, de folk numérique, d’acoustique augmentée, de paysages sonores. C’est l’archive de nos souvenirs et des rêves inventés ensemble. À la fin, on est repartis avec une lettre chacun. HALO ».

Écouter la quête des rêves éveillés

Ce mercredi 17 mai, c’est la Maroquinerie qui s’est retrouvée plongée dans un Grand Halo Blanc. La musique du quartet, aux influences rock, punk et électro a empli tout l’espace de la salle en sous-sol, à l’abri du dehors. « Choisis laquelle, La rouge la bleue, Je l’avais là sur le bout de la langue, Le nom d’un lieu tenu secret »… Le groupe a choisi Pilule Bleue pour commencer son concert et présenter son nouvel album. Comme décrit par Morpheus dans Matrix, le choix entre les deux pilules renvoie à celui entre l’accès à la vérité cachée et les croyances habituelles et confortables. Le morceau, lui, est une berceuse à la croisée des chemins, entre les rêves d’une harpiste et le tonnerre d’un clavier qui gronde. Dans Dans le jardin la nuit, Benoît David et Camille Delvecchio observent les satellites à quatre yeux et chantent le calme à deux voix. Vient ensuite le voyageur Loon, premier morceau et point de départ de l’album. Croisière à dos de chimères où l’on regarde les paysages dériver doucement.

Sous le clignotement des lumières, viennent ensuite Pyramide et Isati, le premier laissant la voix de Benoît prendre toute la place, le second plongeant la salle dans une énergie bleue électrique. Aussi lancinant qu’aquatique, ce dernier morceau est issu d’Image au mur, leur précédent album. Le groupe nous emmène dans les alentours de la maison où ils ont enregistré Halo, avec Fleur, morceau pour les seules voisines qu’il leur est arrivé de croiser là-bas. La promenade se poursuit avec Ailleurs, qui est sans doute l’un de leurs plus beaux morceaux. Une description semble superflue, il vaut mieux l’écouter tout simplement…

Avec l’entêtant Nuit des temps, composé de riffs lancinants et de chuchotements mélancoliques, le groupe a su faire d’une insomnie un lieu paisible. L’attente latente d’un amant s’exprime dans la complainte d’un saxophone, et les cordes ondulent entre le plafond et les cauchemars d’une chambre, donnant des couleurs pastel aux nuits blanches. Mais le jour finit toujours par arriver, les rêves arrivent à leur terme et le concert à sa fin. Après des applaudissements euphoriques, Grand Blanc revient sur scène une dernière fois pour nous offrir un magnifique rappel : avec Belleville, morceau phare d’Image au mur et Immensité, une perle du dernier album, qui finit d’égrainer sa mélancolie en faisant pousser des fleurs au rythme de la harpe de Camille…

 

Prochaines dates

  • Le 25/05/2023 – L’Épicerie Moderne A Feyzin – Lyon (69)
  • Le 03/06/2023 – Des Lendemains qui Chantent – Tulle (19)
  • Le 27/09/2023 – La Laiterie – Strasbourg (67)
  • Le 04/10/2023 – Le Rex de Toulouse – Toulouse (31)
  • Le 05/10/2023 – Iboat – Bordeaux (33)
  • Le 30/11/2023 – La Gaîté Lyrique – Paris (75)

 

© Romain Ruiz

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