Musique
Collard et l’Orchestre symphonique de la Garde républicaine majestueux à la cathédrale Saint-Louis

Collard et l’Orchestre symphonique de la Garde républicaine majestueux à la cathédrale Saint-Louis

13 October 2018 | PAR Alexis Duval

Bartok-Ravel-Smetana : trois compositeurs aux univers différents mais réunis de manière fort heureuse à l’occasion d’un concert à la cathédrale Saint-Louis-des-Invalides, à Paris, jeudi 11 octobre.

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Le moment était aussi bouleversant que solennel. Jeudi 11 octobre, parcourir le chemin qui conduit au cœur de l’hôtel des Invalides jusqu’à la majestueuse cathédrale Saint-Louis pouvait volontiers prendre des allures de procession. Autour d’un programme Bartok-Ravel-Smetana, le prestigieux Orchestre symphonique de la Garde républicaine dirigé par François Boulanger et accompagné au piano par Jean-Philippe Collard ont brillé du début à la fin et a réussi à transformer l’émotion inhérente au cadre en bouleversement musical.

En ouvrant la soirée avec les Danses roumaines pour orchestre (1917) du Hongrois Bela Bartok, les mélodies, ritournelles dont on devine le caractère populaire, constituaient une entrée en matière parfaite, à la fois originale et évidente, pour évoquer le lien à la terre, thème de la soirée. Chacun de ces six petits mouvements qui s’enchaînent à vive allure est pensé autour d’une mélodie que le compositeur a glanée au cours de ses pérégrinations dans ce qui était alors l’Empire austro-hongrois. Interprétation formidable pour la formation parisienne, qui a su jouer avec la part de mystère et de folklore intrinsèques à ces airs.

Viennent ensuite deux œuvres de Maurice Ravel, radicalement différentes l’une de l’autre et révélatrices des tourments de leur époque (1929-1931). Avec une attaque de wood-blocks, premières percussions à surgir comme un éclat, les airs du Concerto en sol majeur, parmi les dernières compositions de leur auteur, semblent avoir en commun avec les Danses roumaines de Bartok d’être inspirées de ritournelles populaires. La modernité des cuivres et de la rythmique, caractéristiques ô combien ravéliennes, préfigurent les envolées jazzy du génial George Gershwin. Dès le premier mouvement, “Allegramente”, le public s’est trouvé transporté par l’interprétation franche et généreuse de l’Orchestre symphonique de la Garde républicaine.

Un piano particulièrement expressif

Plus doux, l’“Adagio assai” est un contrepoint délicat et élégiaque à l’entrée en matière du premier mouvement. Au piano, Jean-Philippe Collard s’est révélé particulièrement expressif, prenant quelques libertés sur le tempo et livrant un lied en tous points sublime. L’œuvre de Ravel se clôt sur un presto qui sort progressivement le public de la mélancolie pour l’emporter dans un brillant et virevoltant tourbillon.

Ecrit à la même période, le Concerto pour main gauche, écrit pour le pianiste manchot Paul Wittgenstein, requiert une puissance et une technique irréprochable. Ca tombe bien, Jean-Philippe Collard a manifesté ses deux immenses qualités dans son jeu. Il fallait voir ses doigts glisser sur le clavier comme une eau cristalline coulerait pour rejoindre sa source. Son interprétation a forcé l’admiration de tous. Quelle beauté que cet enchaînement d’épisodes rhapsodiques !

Finir sur La Moldau du Tchèque Bedrich Smetana fut une idée formidable. La pièce, qui fait partie des œuvres cultes de la musique classique, a été menée par le chef François Boulanger sur un tempo très soutenu et très maîtrisé qui a rendu les lignes mélodiques ultratoniques sans les priver de leur si belle expressivité. Fermez les yeux, et vous verrez des collines d’Europe orientale. Une invitation au voyage en même temps qu’un fascinant rappel des racines qui nous lient inévitablement à la terre nourricière, c’est ainsi que l’on peut imaginer l’envoûtement que provoque le poème symphonique. Une fois de plus, les applaudissements chaleureux des spectateurs respectueux de la cathédrale Saint-Louis étaient plus que mérités.

Crédits photos : AD

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