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Les soirées musicales estivales du festival Idéal au Potager du roi à Versailles

Les soirées musicales estivales du festival Idéal au Potager du roi à Versailles

18 July 2022 | PAR Jean-Marie Chamouard

Le festival Idéal se déroule au Potager du Roi, à Versailles, du 21 Juin au 24 Juillet 2022. Il propose une trentaine de concerts répartis sur cinq week-ends. Le 16 Juillet le violoniste Jakow Pavlenko et le pianiste Mehdi Ghazi interprètent des œuvres de Ludwig van Beethoven, Eugène Ysaye, Igor Stravinski et Gabriel Fauré.

Un festival en plein air, dans un lieu historique

Se rendre à ce concert est déjà un pur bonheur. Le spectateur longe le potager royal, baigné de soleil, dominé par les façades et l’église du quartier Saint Louis. Il arrive dans un verger, les arbres fruitiers en espaliers sont décorés par les cosmos. Seuls des arbres majestueux nous séparent du Grand Canal et la scène est bordée d’hortensias. Un cadre de rêve pour un concert en plein air.
Le festival Idéal est organisé pour le troisième été consécutif par la région Ile de France. Cette année les concerts sont gratuits, un généreux et mystérieux mécène s’étant fait connaitre le premier soir ! Il faut donc simplement payer une modeste somme pour l’accès au potager. Le festival souhaite promouvoir de jeunes talents internationaux. Ce soir la jeunesse brille ! Le pianiste canadien d’origine algérienne Mehdi Ghazi a 32 ans et le violoniste allemand, d’origine Ukrainienne Jakow Pavlenko n’a que 19 ans !

Une ambiance printanière

Le concert débute par la célèbre sonate « Le printemps », de Ludwig van Beethoven. Cette sonate pour violon et piano a été composée en 1800 -1801 mais n’a reçu son nom qu’après la mort du compositeur. Le printemps : le titre exprime bien le caractère lumineux, souriant, épanoui de cette sonate inspirée par la musique de Mozart. L’allégro initial est lyrique, le thème très mélodique, très connu. C’est une ballade insouciante sous un vent printanier. Le vent qui ce soir, fait voler les partitions du violoniste ! L’adagio est un chant d’amour qui est parfois seulement murmuré par le violon puis repris par le piano. La pureté et la douceur du jeu de Jakow Pavlenko rendent cette « sérénade » très émouvante. Après un bref scherzo, le rondo final est plus contrasté, plus nostalgique aussi. Des moments très mélodieux alternent avec des passages plus vifs rythmés par les pizzicatos, dans un très beau dialogue entre le piano et le violon.

Le talent de la jeunesse

Jakow Pavlenko interprète seul la sonate n° 5 d’Eugène Ysaye (1858-1931) Le compositeur et violoniste belge a écrit six sonates pour violon, chacune pour l’un de ses élèves préférés. Pour le compositeur « un maître du violon » doit aussi être penseur, poète et pouvoir exprimer dans son jeu toute la gamme des émotions humaines. Dans son interprétation Jakow Pavlenko a mis toute sa fougue, toute son énergie et beaucoup d’émotions. La sonate débute par « l’aurore ». La musique semble émerger des brumes, d’un songe. Le chant du violon est plaintif, douloureux même, ponctué par des dissonances et des pizzicatos. Cette journée parait être un combat, nécessitant du violoniste puissance et virtuosité. Le deuxième mouvement est une danse rustique, très rythmée presque tzigane. Les accents vigoureux alternent avec des moments romantiques. Un morceau de bravoure pour le soliste !
Mehdi Ghazi joue ensuite l’adaptation pour piano du ballet d’Igor Stravinski l’Oiseau de Feu, dans une transcription de son contemporain Guido Agosti. Spectaculaire ! L’œuvre débute par une danse infernale. L’entrée du pianiste est fracassante avec une forêt d’accords, soit plaqués avec force, soit piqués, malicieux, évoquant les sautillements de l’Oiseau de Feu. La difficulté technique est évidente, la virtuosité du pianiste époustouflante. Le rythme est de plus en plus frénétique, l’ambiance sonore frappante. Puis la berceuse : la mélodie, toute simple, murmurée, d’une grande douceur. Un voyage dans un royaume endormi. Le chant du vent et des oiseaux dans les arbres du potager semble répondre au piano. Retour de la vélocité et des accords pour un final grandiose tout en puissance.

 

Une sonate « patriotique »

Le concert se termine par la sonate pour piano et violon de Gabriel Fauré. Une œuvre de jeunesse, composée en 1875-76 et créée en 1877, le compositeur au piano. Cette œuvre marquera un renouveau de la musique de chambre française. Elle sera une œuvre patriotique, dans une confrontation directe avec la musique allemande et celle de Brahms en particulier, même si la sonate est aussi inspirée par les œuvres de Robert Schumann. Dès l’allegro molto la musique est chaude, lumineuse, ample, enveloppante. Le piano et le violon semblent ne faire qu’un. On pourrait imaginer une houle lente avec des vagues montantes et descendantes. Les accords modestes presque sourds du piano, le chant mélancolique du violon : l’andante est très pur, paisible, un peu mystérieux. Les accents rapides, les pizzicati, la vélocité dominent le scherzo, un mouvement rempli de vivacité et de gaité. Le 4ème mouvement est enjôleur puis tourbillonnant avant le feu d’artifice final.
Le spectateur quitte ce concert illuminé par le soleil couchant qui éclaire l’église St Louis, ravi de la beauté de ce lieu historique, séduit par le programme et le jeu des deux jeunes interprètes.

visuel : JMC

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Jean-Marie Chamouard

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