
« La menace 732 » de Frédéric Potier : pratiquer le vice et fuir la vertu
La menace 732, premier roman de Frédéric Potier, est une incursion dans les milieux de l’ultradroite française, adepte du coup de poing.
Ce polar a reçu le prix Edgar-Faure 2022. Le prix a été initié par le psychanalyste Rodolphe Oppenheimer, petits-fils de l’homme d’État, pour récompenser un ouvrage politique de l’année.
Ici, le titre annonce la couleur : en 732, Charles Martel vainquit les Sarrazins à Poitiers. Pour les identitaires, cette date symbolise l’écrasement de l’Islam par la chrétienté. Ainsi, des activistes s’en revendiquent et organisent un coup d’État pour renverser la République.
Frédéric Potier décrit avec précision les rouages d’un système bousculé, fragilisé. C’est le retour des années trente, de l’antiparlementarisme, de l’instabilité politique et du complot judéo-maçonnique. Avec la haine des Arabes en sus. La fonction d’énarque de l’auteur donne du crédit au récit et le rend vivant.
Les cours universitaires de Sarah Effenberg, dispensés à Sciences Po sur les coups d’État, sont brillants. Les exemples qu’elles donnent (Allende, révolution bolchévique…) permettent de comprendre le mécanisme et la logistique d’un putsch. Il est terrifiant de constater la facilité avec laquelle quelques illuminés peuvent renverser une République et priver les citoyens des libertés fondamentales.
La menace 732 décrit le retour de la bête immonde. Pour Frédéric Potier, le totalitarisme est comme le volcan, il est en sommeil. Endormi seulement.
La menace 732 de Frédéric Potier. Éditions de l’aube/collection Mikros noir. 2023, 386 pages, 12,90€.